Jeudi matin, alors que je suis au boulot, je reçois un texto de Serge, le piqueur de la société de chasse de Justian : Bonjour, battue sanglier le 15/10/2022, rdv Lagardère 7h. Je ne suis vraiment pas fan des battues et j'y vais de moins en moins mais je n'ai rien de prévu samedi matin et il faut aussi savoir faire un effort de temps en temps pour le fonctionnement de la société de chasse qui m'accueille si gentiment pour les tirs d'été. Vendredi soir, j'appelle Serge pour connaître le secteur de chasse et il m'annonce le bois du Mulet. Une bande d'une vingtaine de sangliers s'est installé dans ce bois depuis un moment et fait des dégâts sur un champ de sorgho attenant. Nous allons chasser avec la commune voisine de Boquère. J'ai un très bon poste dans ce bois, l'an dernier, je me suis fait avoir par les sangliers car j'étais un peu trop avancé dans le sale, je vais tenter de prendre ma revanche. Je lui dis que je viendrai.
Ce matin, il me faut me lever tôt car j'ai 45 minutes de route. J'arrive sur place vers 6h50, seul Serge el Cyril notre nouveau Président sont là. Je m'inscris sur le carnet de battue car c'est notre première battue de la saison. Les chasseurs arrivent petit à petit. Vers 8h15, le temps d'attendre tout le monde, notre Président répartit les postés. Je suis le seul archer, les chasseurs de la commune voisine ne semblent pas habitués aux archers et certains me regardent avec un petit sourire en coin quand Cyril annonce ma présence dans la traque. Nous partons nous poster, Serge m'a demandé de ne pas rentrer trop vite dans le bois pour ne pas risquer de faire sortir les sangliers avant que les chasseurs ne soient postés. Je me gare et attends que les chasseurs commencent à aller se poster puis je pars en longeant une ancienne vigne en friche et partiellement boisée pour rejoindre un chemin forestier qui traverse le bois du Mulet. Je longe un moment ce chemin puis bifurque à droite sur une très grosse coulée et la suis. Je passe un talus au départ d'un grand fossé, au bout d'une bande épaisse d'épines noires. Je bifurque ensuite derrière les épines pour descendre vers le bas du bois pour me poster au bout d'un épais fourré où se trouvent souvent les sangliers. Je suis une autre belle coulée quand des animaux démarrent dans le fourré. Je viens de lever les sangliers, ils ne semblent pas partis loin. La coulée prend à gauche pour passer entre le bout de la bande d'épine et le bout du taillis. Je presse le pas et passe le gros fossé qui ressort des épines puis avance un peu dans le sale pour revenir me poster près du fossé, au bout des épines qui sont sur ma droite. En face de moi, une petite zone plus dégagée sur la droite du fourré.
Je coupe discrètement quelques branchettes autour de moi pour ne pas être gêné au moment du tir puis je ne bouge plus. Les sangliers bougent encore un petit moment dans le fourré puis le calme revient alors que les premiers chiens se font entendre. La sonnerie de début de traque retentit, Cyril a demandé à ce qu'on ne tire que les sangliers. Presque immédiatement, un pas léger et des bruissements se font entendre dans mon dos. Je le retourne doucement et entraperçois une petite silhouette qui se débine dans les épines. Je me doute qu'il s'agit d'un renard. Je reste immobile et l'aperçois vite, il avance encore un peu puis bifurque à 90 degrés et vient droit sur moi par une grosse coulée. Il est magnifique son pelage clair est très touffu et sa queue semble énorme. À 3 mètres de moi, il sursaute en entendant la voix des chiens qui se rapprochent et tourne la tête pour regarder vers eux un court instant avant de vouloir repartir droit sur moi. C'est alors qu'il m'aperçoit. Il fait volte-face, disparaît un instant dans les épines, traverse le fossé et biaise pour rentrer dans le fourré où je le perds de vue. Les chiens ne tardent pas à arriver mais perdent vite la voie du renard et se dispersent dans le bois. Serge arrive dans mon dos au travers des épines qui griffent bruyamment ses vêtements. Les chiens donnent de la voix plus haut, Serge crie pour les encourager et bifurque pour remonter en longeant les épines.
Il rejoint la grosse coulée que j'ai prise en quittant le chemin puis continue droit en suivant le haut du bois. Les chiens ne tardent pas à lancer. Ils foncent vers moi. La menée se rapproche quand une petite boule roux clair surgit du taillis et disparaît dans le fossé. C'est un marcassin d'environ 5 kilos. Il remonte le talus du fossé et vient stopper à 2 mètres de moi sur une belle collée, pile dans une trouée de la végétation. J'hésite à le flécher mais décide de le laisser passer. Il m'aperçoit et retourne dans le fossé puis remonte le talus de ce dernier juste à 3 mètres sur la gauche pour prendre une grosse coulée au petit trot et disparaître dans le bois. Les chiens arrivent vite et se lancent à sa poursuite pour le faire sortir en haut de la friche où il sera tiré et manqué. Les menées s'enchaînent dans le sorgho et dans le bois, des coups de feu sont tirés.
Serge remet les chiens dans le fourré, et très vite ils lancent les sangliers, encore une fois ça vient vers moi. Tout à coup, une masse noire attire mon regard. Une grosse laie très sombre est sortie du taillis et baise au petit trot vers la bande d'épines. Elle est à 40 mètres, trop loin. Arrivée dans les épines, elle ralenti et se débine doucement, j'accroche mon décocheur. J'ai espoir de la voir passer mais les craquements ne se rapprochent pas quand un craquement m'interpelle dans mon dos. Je le retourne et aperçois 2 sangliers qui sortent du taillis et stoppent presque immédiatement. Un gros gris s'arrête à environ 12 mètres mais est un peu caché par la végétation, un autre, plus petit, d'environ 45 kilo, au pelage plus sombre, stoppe à 8 mètres de moi plein travers. Sa tête est derrière un arbre, j'arme très rapidement et aligne ma visée au travers de la végétation, sur une petite trouée qui dégage sa zone vitale. Je décoche rapidement, ma flèche me semble bonne, l'impact retentit et les sangliers démarrent en trombe. Je perds presque immédiatement mon sanglier de vue. Le gros gris saute par-dessus un gros tronc tombé au sol puis biaise vers les épines. Je rencoche vite et accroche mon décocheur. Alors que j'entends déjà mon sanglier se débattre au sol en peu plus haut, le gros sanglier me contourne dans les épines sans que je puisse le voir puis s'éloigne doucement. D'autres coups de feu sont tirés. La menée s'éloigne puis le calme s'installe alors que les piqueurs rappellent en vain leurs chiens.
Le temps passe et plus un bruit, j'en profite pour aller vérifier mon tir. Ma flèche et au sol près de la zone du tir. Le sanglier l'a tournée à 90 degrés de l'angle du tir en partant. Elle est pleine de sang et je trouve immédiatement les premières gouttes de sang dès l'impact. Je suis tranquillement la piste qui zigzague entre les arbustes, le bois mort et les épines en longeant plus ou moins le bord des épines. Après environ 20 mètres, elle bifurque dans les épines pour traverser le fossé et ressortir des épines. Le sang devient alors très abondant.
Je retrouve vite mon sanglier, une mousse rose sort du trou d'entrée de la flèche qui a traversée les poumons.
Je ramène mon sanglier à mon poste et fais quelques photos souvenirs.
Au bout d'un moment, Serge revient avec les chiens pour repasser le fourré. D'autres chiens lancent un sanglier à la vigne en friche et la menée semble descendre doucement vers moi mais les coups de feu claquent en bas du bois, le sanglier est sorti dans le champ. Les chiens de Serge lancent un animal qui semble être un chevreuil et qui biaise vers le haut du bois en sortant du fourré. Le reste des teckels ressortent au bout du taillis pour se mettre au ferme sur mon sanglier mort avant de repartir voir Serge. Les piqueurs insistent encore un peu mais ne trouve pas d'autres sangliers. La fin de traque est sonnée.
J'attache le sanglier par le groin et le remonte dans le pré en le tirant derrière moi. Arrivé au bord du bois, je pars chercher ma voiture et la rapproche pour charger mon sanglier avant de rejoindre la salle des chasseurs où je me rends compte que je suis le seul à ramener un sanglier à part les 2 marcassins que les chiens ont attrapés. 2 sangliers ont été blessés, balles de ventre semble t-il, mais personne ne veut aller les chercher et personne ne veut m'expliquer où aller les chercher, c'est aussi pour cela que je ne suis pas fan des battues, beaucoup de chasseurs ne sont là que pour tirer et n'ont aucun remords à laisser pourrir des animaux dans les bois. Beaucoup de chasseurs viennent voir mon sanglier et me poser des questions sur mon arc. Après un apéro rapide, 2 verres d'eau pour moi, les chasseurs s'en vont et je pars peler mon sanglier à Justian avant de rentrer. Les 2 sangliers blessés ne feront l'objet d'aucune recherche et aucun chien de sang ne sera appelé, ces comportements me désespèrent.
Alex