Il a neigé ces jours-ci sur les Pyrénées, ce matin, je pars pour Sarrancolin pour tenter de flécher mon C1 revêtu de ma tenue camo neige. Le chemin de la Soule est complètement verglacé et je décide donc de me garer en bas de ce dernier, au niveau des premières maisons. Il ne fait pas encore jour, le thermomètre de la voiture indique -8°C.
J'écoute la radio en attendant que la luminosité soit suffisante pour commencer ma chasse. La température est passée à -9°C. Aux premières lueurs, je quitte la voiture et prends le passage sur la droite des habitations pour remonter vers la combe où j'ai fléché mon faon l'autre jour. Je tombe vite sur les premières traces de cervidés dans la poudreuse. J'avance doucement en remontant vers le bois, la neige poudreuse est silencieuse. Je m'arrête régulièrement pour observer et écouter. Je suis maintenant entre les 2 penchants de bois et les pistes sont de plus en plus nombreuses : renard, chevreuils, grands cervidés, gros sanglier... Les traces de quelques grands cervidés semblent fraîches et remontent vers Tahouens. Je les suis tranquillement quand alors que je commence à biaiser pour remonter vers la bordure des buis, à ma droite, une impression bizarre me fait stopper net. Je tourne doucement la tête en arrière et aperçois une belle biche qui m'observe en bordure des buis. Elle finit par démarrer et c'est alors que la bichette et le faon se lèvent juste à côté d'elle, tout ce petit monde remontent dans les buis en faisant tomber la neige des branches basses.
Je continue à monter vers la crête pour la rejoindre au-dessus de la grange de Tahouens, en faisant quelques pauses observatoire. Arrivé au sommet, je profite un instant du lever de soleil qui colore l'horizon en rose sur un magnifique paysage enneigé.
Je reprends ma chasse en suivant la crête rocheuse toujours d'un pas lent étouffé par les 20 cm de poudreuse en m'arrêtant souvent pour écouter et observer. J'aperçois, tout à coup, à mes pieds, un moulage d'empreinte de chevreuil gelé, un chevreuil passé par là e frais avec une semelle de neige tassée et gelée sous son sabot, l'a laissée tombée là.
Un peu plus haut, je trouve de nombreuses traces de sangliers qui ont traversé la crête dans une zone dégagée. Les pistes sont espacées de plusieurs mètres. Je suis un moment la crête en surveillant alternativement les 2 penchants.
Un peu plus loin, je biaise à gauche pour quitter la crête et m'enfoncer dans les buis. J'avance toujours doucement en faisant de nombreuses pauses pour écouter et observer. Alors que je regarde les traces au sol, du bruit me fait lever les yeux vers un buis qui s'agite encore en laissant tomber son manteau de neige, un gros animal vient de démarrer à quelques mètres de moi. Il a immédiatement disparu dans les buis et je ne sais pas s'il s'agit d'un gros sanglier solitaire ou d'un cerf. Je m'avance un peu et tombe sur une grosse couche de forme ovale d'environ 1,4 mètre de long, creusée dans la neige jusqu'à la terre et partiellement cachée par les branches basses des buis. L'animal est parti vers le bas, je tente de l'apercevoir en avançant dans les buis mais sans succès.
Je descends peu à peu vers la combe et la rejoins pour la traverser et atteindre le chemin forestier qui longe le penchant opposé pour remonte jusqu'en haut du chemin de la Soule. Ce chemin rejoint, je le longe tranquillement en surveillant les prés enneigés qui s'ouvrent sur ma droite et profite du la superbe vue sur la falaise qui domine la montagne.
Un peu plus haut, le sentier passe ente les dernières maisons du chemin de la Soule puis continue à monter. Je passe les habitations et poursuis ma route en surveillant au-dessus et en dessous quand je me fais surprendre par une biche, une bichette et un faon qui me regardent arriver au milieu d'un petit pré en dessus du chemin. Ils sont à environ 30 mètres de moi, 10 mètres sous le chemin. Je me fige mais ils démarrent et disparaissent rapidement. J'attends un instant au cas où je n'aurais pas vu d'autres animaux
quand je me fais surprendre par une biche, une bichette et un faon qui me regardent arriver au milieu d'un petit pré en dessus du chemin. Ils sont à environ 30 mètres de moi, 10 mètres sous le chemin. Je me fige mais ils démarrent et disparaissent rapidement. J'attends un instant au cas où je n'aurais pas vu d'autres animaux puis me remets en mouvement, je passe maintenant au-dessus d'un petit hameau de maison, 50 mètres en contrebas. Plus loin, j'aperçois un grand cervidé, sans pouvoir l'identifier, au fond du pré qui se trouve derrière le hameau. Il est arrêté à environ 300 mètres sur le chemin qui remonte vers les bâtiments et regarde vers moi. Je m'arrête et l'observe un instant, l'approche semble très compliquée, je décide de poursuivre ma route et il me regarde passer sans bouger. Plus haut, je retombe sur les 3 cervidés qui m'observent à environ 50 mètres dans le creux sous le chemin. Le temps d'attraper mon appareil photo, ils démarrent et rentre sous les arbres.
La biche bifurque à environ 80 mètres et remonte vers le chemin alors que les 2 jeunes n'ont pas suivi. Avant de sauter le sentier, elle se retourne pour observer derrière elle et se ravise avant de redescendre vers les 2 retardataires pour remonter ensuite un peu plus loin. Cette fois les 2 autres ont suivi et tout le monde saute le chemin puis escalade le talus assez raide du chemin pour remonter vers le sommet de la montagne. Ils s’arrêtent sur la crête et regardent vers moi à environ 150 mètres.
Avancent encore un peu puis stoppent à nouveau avant de disparaître un peu plus haut derrière la crête.
Je reprends mon ascension jusqu'à une crête rocheuse qui descend assez raide sur la gauche du chemin, c'est un bon passage de gibier et je décide de descendre en la suivant. La droite de la crête descend à pic le long d'une barre rocheuse de 15 à 20 mètres de haut au pied de laquelle passe souvent les animaux. La gauche est moins pentue, le relief remonte tranquillement vers la crête. J'avance tranquillement en regardant alternativement des 2 côtés quand un chevreuil surgit sur ma gauche. Il fonce vers moi au galop à environ 40 mètres mais biaise ensuite pour prendre la descente en direction d'une cassure dans la crête rocheuse à environ 30 mètres devant moi. Je le perds vite de vue derrière les rochers et m'attends à le voir réapparaître sur la coulée au pied de la barre rocheuse à ma droite mais rien. Il a dû descendre dans l'alignement de la crête. C'est étonnant que ce chevreuil soit remonter si vite vers moi, quelque chose a dû le déranger et je ne pense pas que ce soit moi, je continue un peu à descendre et stoppe un peu plus bas pour observer quand une silhouette rousse m’apparaît dans mon dos sur ma gauche. Un daguet remonte de la combe en direction de la crête. Je me tourne vers lui et me fige, je suis à découvert au milieu de quelques petits arbres et pense qu'il va me voir mais il continu à monter vers la crête d'un pas tranquille à environ 30 mètres puis biaise pour monter droit sur moi sans me voir, mon camo neige semble très efficace.
Je le laisse se rapprocher, à environ 15 mètres, il passe derrière un arbre et j'en profite pour armer rapidement mon arc et aligner ma visée dans sa direction. Il continue son chemin droit sur moi, je le suis dans mon viseur, j'hésite, la position n'est pas idéale, 10, 9, 8, 7 mètres. Je décide de prendre ma chance. Je cale mon viseur sur son poitrail et décoche alors qu'il avance toujours d'un pas lent, craignant qu'il ne finisse par me repérer et s'enfuir. Ma flèche le frappe dans l'épaule et rentre au 3/4. Il fait volte-face et repart d'où il vient avec ma flèche plantée pour disparaître à environ 40 mètres derrière une cassure de la pente devenant plus raide. Je reste immobile à l'écoute et observe l'endroit du tir.
De ma position, je ne vois pas de sang alors qu'il devrait être très visible sur la neige. Après une moment d'attente, je m'avance sur la piste du daguet très facile à suivre dans la neige et constate vite qu'il perd très peu de sang. Les microgouttelettes ont gelé en touchant le sol, se transformant en petites billes rouges qui ont roulé sur la neige.
Après une vingtaine de mètres la piste s'intensifie un peu mais sans la neige elle serait difficile à suivre, le sang est brumisé en petites gouttelettes gelée sur la neige.
Un peu plus loin, je trouve un amalgame de sang gelé avec quelques poils.
Un peu avant la cassure dans la pente où j'ai perdu le daguet de vue, une roche affleurante porte quelques gouttes plus grosses.
Je commence à descendre dans le creux de la combe en suivant la piste quand un bruit de bois casé me fait stopper. Je tente d'en apercevoir l'origine au travers des arbres, un bruit caractéristique se fait alors entendre, le daguet vient de casser ma flèche, je l'ai certainement relevé. J'attends un moment et observe le secteur sans rien voir.
Je décide de reprendre ma progression et continue à suivre la piste qui suit la courbe de niveau.
Un peu plus loin la piste biaise à droite vers un bouquet d'arbustes et des arbres morts tombés au sol.
Juste avant le couvert, le daguet a perdu un caillot de sang.
Je traverse les arbustes et passe les arbres mort pour tomber sur une coche dans la neige. Une marque de sang a coloré la neige au niveau de l'entrée de la flèche. Le daguet s'était couché là à environ 50 mètres de l'endroit du tir et je l'ai relevé pendant ma recherche. C’est plutôt bon signe qu'il se soit couché aussi vite.
J'aperçois mon empennage dépassant de la neige quelques mètres plus loin.
Je ramasse ma flèche, elle est cassée, le daguet a laissé tomber 1/3 de la longueur du tube environ, le reste doit encore être à l'intérieur de l'animal. Je la glisse dans ma guêtre pour la prendre avec moi vu qu'elle ne peut plus tenir dans le carquois.
Je la glisse dans ma guêtre pour la prendre avec moi vu qu'elle ne peut plus tenir dans le carquois. Une impression bizarre me fait lever la tête et j'aperçois alors mon daguet entrain de vaciller, à environ 30 mètres, sur un petit replat rocheux dépassant du flanc d'un mur de roche et qui me domine d'une vingtaine de mètres. Je ne bouge plus et attends espérant le voir tomber mais après quelques secondes, il avance un peu en chancelant et disparaît derrière le replat rocheux. Je m'attends à l'entendre ou le voir basculer dans le vide mais rien. Le temps passe et le calme s'installe. Je décide de remonter la pente assez raide pour rejoindre le replat rocheux. En arrivant près de la falaise, je dois emprunter un petit passage très étroit pour remonter sur le replat juste avant lequel j'arrive sur une autre couche avec, comme dans la première, une belle trace de sang.
En montant sur le petit replat, j'aperçois mon daguet couché plein travers dans un petit creux du replat suivant. La moitié avant est cachée par la végétation enneigée. Sa zone vitale n'est pas visible et je décide de rester sans bouger en espérant qu'il donne vite son dernier souffle, une flèche encochée et mon décocheur accroché au cas où.
Le temps passe, sa respiration est très difficile et saccadée, il redresse un peu la tête par moment laissant apparaître ses bois et ses oreilles au-dessus de la végétation. Ma position est très inconfortable car mon pied droit est en appui sur une pente à 45 % précédant, 1 mètre plus à droite, d'un précipice de près de 20 mètres. Si je glisse, je finis en bas sur les rochers, je décide de reculer de quelques pas pour arriver au niveau d'un arbre qui pousse au bord du vide et me sécurisera un peu. La neige tassée par mes pas précédents crisse sous mes semelles et le daguet inquiet commence à agiter les oreilles puis tend son cou et m'aperçois par-dessus la végétation avant de se redresser. J'arme mon arc alors qu'il s'est tourné face au précipice et chancelle. J'aligne vite ma visée et décoche au moment où il saute dans le vide. J'entends sans voir mon atteinte. Je n'ai pas entendu l'animal tomber au pied de la falaise mais pensant qu'il est arrivé en bas et ne pouvant pas m'approcher trop du bord du replat à cause de mon vertige, je fais demi-tour pour revenir sur mes pas et chercher un chemin pour aller au pied de la falaise. Alors que j'arrive à l'endroit où devrait se trouver le daguet, aucune trace de lui, je lève alors les yeux et l'aperçois. Il est resté accroché à un arbre environ 15 mètres plus haut. Ses pattes avant pendent d'un côté de l'arbre et ses pattes arrière de l'autre au-dessus du vide.
Je n'ai pas le choix, il me faut monter le décrocher. Je remonte vers le replat pour tenter de l'atteindre mais descendre par-là est trop périlleux.
Je pose mon arc peu après le replat et redescends puis commence à grimper le long de la paroi rocheuse en m'agrippant aux arbustes, arbres et autres rochers pour le rejoindre et parviens à passer au-dessus de lui. Je m'agrippe à un arbuste et pousse le daguet avec mes pieds pour le faire passer du côté droit de l'arbre et le faire tomber au pied de la falaise où il roule sur quelques mètres avant de se caler dans la neige. Alors que je cherche comment redescendre, j'aperçois ma seconde flèche posée au sol sur un petit replat, un peu plus haut contre la paroi rocheuse et remarque un petit passage pour l'atteindre. Je remonte donc la chercher.
Je remarque alors un passage pour monter sur le replat et pars chercher mon arc pour remettre ma flèche au carquois avant de descendre voir mon daguet et lui apposer le bracelet. Ma seconde flèche lui a traversé le cou coupant une carotide. Je me pose un peu pour décompresser cette escalade éprouvante et prendre quelques photos avant de commencer à descendre ma prise.
Il me faut le tirer sur environ 300 mètres dans la combe pour arriver au bout du pré en dessous des maisons. La pente est raide et je me fais parfois pousser par mon daguet qui prend de la vitesse avant de se coincer dans un amas de branches, de roches ou contre un arbre. En sortant sur le pré enneigé, je fais démarrer, à quelques mètres de moi une biche et son faon qui surgissent d'un bouquet de buis passent dans mon dos en plein découvert pour rejoindre le couvert un peu plus loin. Je finis par rejoindre un chemin qui remonte vers les habitations et appelle Patrick pour qu'il vienne me chercher au hameau. Le temps qu'il arrive, je traîne mon daguet sur plus de 200 mètres en remontant vers les maisons. Je fais quelques pauses pour reprendre mon souffle et admirer la falaise enneigée qui me domine au sommet de la montagne.
Je suis presque arrivé aux maisons quand le renfort arrive, nous chargeons mon daguet et partons chez Patrick pour faire quelques photos avant de s'occuper du dépeçage et de la découpe. Je retrouverai le reste de ma flèche planté dans la panse, elle est passée en arrière des poumons, déviée légèrement par l'os de la patte et les cotes. Mon daguet aura fait presque 100 mètres.
Alex