Ce soir, j'ai décidé d'aller chasser le secteur en dessous du lac et peut être me poster en bordure du grand bois, sur le passage des chevreuils entre le bois et le bosquet si le vent me le permet. Je gare ma voiture sous la digue du lac, attrape mon arc et contrôle le vent. Il souffle vers le lac.
Ayant repéré 4 chevreuils autour du maïs hier soir, je décide de commencer par chasser à bon vent les passages de canon un à un. Je progresse doucement jusqu'au bout du premier puis reviens sur mes pas et passe au second avec le même procédé puis longe le troisième sans voir le moindre chevreuil. Au bout du troisième passage, je ressors sur la bande enherbée et redescends tranquillement vers le coin du bois, passe le passage busé qui enjambe le ru et remonte en longeant le bois vers l'endroit d'où je vois parfois sortir les chevreuils du bois.
La bordure interne du bois est bordée par une sorte de ruisseau asséché encaissé de 3 à 4 mètres et dont les versants sons assez pentus. Je rentre dans le bois par un passage de gibier et tente de trouver un poste adapté avec assez de visibilité tout en restant suffisamment camouflé sur le penchant côté lisière mais le sol sec est très bruyant et je dois vite choisir mon poste pour ne pas trop déranger le secteur. Une fois posté, je m'ennuie très vite et me dit que j'ai fait trop de bruit en me postant. Je ne sens pas cette position. Je quitte donc mon poste et finis de remonter vers la crête en suivant le bois. Je progresse maintenant tranquillement en suivant la crête sur un champ labouré à 30/30 mètres du bois à ma gauche. Le penchant de droite est un champ travaillé. Je rejoins une petite haie éparse qui borde une friche. Je passe la haie et m'avance dans la friche tranquillement en longeant la haie épaisse qui longe la crête et en surveillant le penchant à ma gauche. La bande de friche descend vers le ri tour en bas dans la combe. Tout à coup, j'aperçois un chevreuil à environ 350 mètres dans une friche en contrebas, sous un petit bois qui descend de la crête.
L'approche semble impossible au premier abord mais je décide de tenter le coup. Je décide de longer doucement la haie pour rejoindre le bord du bois et tenter de descendre en le suivant pour me rapprocher du chevreuil. J'avance doucement en longeant la haie dans la végétation basse en stoppant quand le chevreuil redresse la tête et regarde autour de lui. J'arrive ainsi facilement à 50 mètres du bois mais la végétation devient alors très dense, l'herbe haute est entremêlée de ronces rampantes et de plantes ligneuses. Ma progression dans cet enfer végétal sera trop bruyante et je me ferai très vite repéré, je cherche vite un plan de secours et constate qu'une sorte de fossé longe cette friche de végétation haute jusqu'à une parcelle de blé clairsemée qui n'a pas été moissonnée à cause de sa piètre qualité. Elle fait suite à la friche où se trouve le chevreuil et ce dernier semble se diriger vers cette culture. Je m'engage baissé sous le niveau de la végétation dans ce fossé et commence à descendre tout doucement. Rapidement le fond du fossé se tapisse de ronces et je lutte avec ces dernières pour ne pas les faire crisser. Chaque pas à moitié accroupis est une lutte et je dois souvent aider mon pied à la main pour lui faire passer les ronces ou les dégager. Petit à petit, je progresse alors que le chevreuil s'avance toujours vers le blé, très lentement, pas à pas, en broutant. Alors qu'il ne me reste que 15 mètres pour arriver au bout du fossé, une zone de végétation plus basse complique ma progression qui devient un peu trop bruyante à cause des ronces. Le vent soutenu qui vient de ma droite couvre un peu ma progression mais le chevreuil qui semble être un brocard commence à lever régulièrement la tête pour regarder vers moi. Je dois rester de longs moments immobile, parfois dans des positions peu confortables mais à chaque fois il se remet à brouter et continue à avancer. La zone claire passée, je me cale derrière une touffe de végétation à moins de 10 mètres du bout du fossé alors que le brocard regarde à nouveau vers moi, il est à environ 150 mètres et me fixe de longues secondes. Je tente d'imiter un chevrillard en soufflant par à-coups entre mes lèvres gonflées mais le son émis est trop faible. Au bout d'un moment, je décide de tenter d'avancer à 4 pattes dans le fossé et de gagner les derniers mètres sans m'arrêter car la luminosité commence à baisser. Le brocard se remet à brouter avant que j'arrive au bout du fossé mais commence à biaiser vers le ru en contrebas.
Je m'assois sur une grosse motte de terre, derrière une touffe de végétation, au bout du fossé près du blé et l'observe. Je ne peux plus avancer sans être vu car le blé ne me camouflera pas suffisamment et les pailles cassantes sont trop bruyantes. Je tente des aboiements, le brocard lève la tête et regarde un moment vers moi, j'aboie à nouveau, il ne bouge pas, j'insiste, il s'avance d'un pas dans ma direction et se remet à brouter. J'attends un peu et aboie à nouveau, il redresse la tête puis fait à nouveau un pas vers moi et se remet à brouter. Je poursuis ainsi mes aboiements espacés et le brocard, entre 2 prises de nourriture, se rapproche tranquillement jusqu'au bord du blé. Il est maintenant à 100 mètres environ et la luminosité baisse vite, il ne me reste plus trop de temps. J'aboie à nouveau, il regarde un moment vers moi, j'insiste et cette fois il s'avance et commence à biaiser vers moi dans le blé. Il avance tranquillement tout en s'arrêtant régulièrement pour chercher ce chevreuil qui aboie. Je le laisse chercher et allume la petite lumière qui éclaire le pin's de mon viseur. Le chevreuil avance de quelques mètres, s'arrête, regarde, repars, s'arrête à nouveau... la distance diminue peu à peu, il n'est plus qu'à 30 mètres, je monte doucement mon arc, il passe en dessous de moi puis remonte un peu comme pour tenter de recouper le vent puis baisse la tête dans le blé. Il est à environ 25 mètres mais je n'aurais pas de meilleure occasion vue la luminosité. J'arme, cale ma visée, bizarrement je suis très confiant malgré la distance et décoche. Un crac retentit alors qu'il me semble voir une petite étincelle sur le chevreuil et ce dernier disparaît dans le blé.
Le temps de me rendre compte qu'il est tombé, je me redresse et cours vers lui, alors que je l'entends se débattre au sol, pour éviter de le voir se relever et m'échapper. A mon arrivée, il finit de mourir. Ma flèche lui a cassé les 2 omoplates et il a cassé ma flèche dans sa chute, seul un petit bout de tube dépasse de son épaule.
Je récupère les morceaux de ma flèche et appose mon bracelet, ma lame mécanique n'a même pas réussi à traverser l'animal et s'est arrêtée sous la peau côté opposé au tir. Je viens de boucler mon dernier bracelet de tir d'hiver et je ne suis pas prêt d'oublier cette superbe partie de chasse. La nuit s'installe, il est temps de rentrer avec mon chevreuil sur l'épaule.
Alex
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