Ce soir, Laurent est venu pour chasser quelques jours et je décide de l'amener chasser sur Labéjan, nous partons assez tôt car je veux lui montrer un poste dans lequel je crois beaucoup. En arrivant, je me gare sous la digue du lac puis nous le longeons pour rejoindre le passage busé en direction du chaume de maïs. Alors que nous longeons le bois, Laurent, en se retournant, aperçoit un chevreuil qui sort du couvert et nous passe à 70 mètres dans le dos. Je laisse Laurent près de son poste en lui expliquant où se placer puis je retourne vers la voiture, décidé à passer la soirée au bois du Turc mais en chemin, je change d'avis et décide de rester chasser sur le secteur. Laurent va rester posté et en restant assez loin, je ne le dérangerai pas.
Je retraverse le passage busé puis longe le ruisseau qui borde le grand bois en direction d'un chemin forestier qui passe sous une coupe où j'ai régulièrement vu des chevreuils. J'y ai filmé une chevrette cet été
et je sens bien ce poste ce soir. Les sangliers ont retourné le bord de la bande enherbée. Un peu plus loin se trouve un petit bois en long qui remonte sur le coteau et où paissent souvent les chevreuils mais ce soir rien ne bouge. Je traverse une grosse haie en prolongement du bois qui rejoint le grand bois, traverse un petit pré et saute la clôture électrique pour biaiser à travers un semé vers la bordure du bois. Ici les sangliers ont tout retourné sur 10 à 20 mètres de large le long du bois !
Je rattrape un peu plus loin le chemin forestier qui remonte vers la coupe. La semaine dernière un gros brocard est sorti du bois dans le secteur et m'a vite repéré pour faire demi-tour. Je décide de tenter de me poster dans le bois, près de la coupe. Je m'avance doucement par un passage girobroyé et rattrape une grosse coulée couverte de boue sèche par les sangliers. Je cherche un peu un poste adéquat et finis par me placer derrière un bouquet d'arbres. Le vent est bon, l'attente commence. Au bout d'un moment que seul le chant des oiseaux est venu troubler, je décide de tenter quelques appels de Butollo, la saison favorable pour l'appel des chevrettes devrait bientôt commencer. Rien ne bouge, je laisse passer encore un moment puis retente ma chance sans trop insister puis un moment passe et je tente encore mais c'est le calme plat.
Je décide de quitter mon poste et de revenir vers le bosquet en long. De loin, j'aperçois 2 chevreuils qui reviennent vers le bois en haut du coteau au travers d'une friche. Un troisième chevreuil s'éloigne du bois et descend vers une haie qui sépare la friche d'un champ semé. Je décide de tenter une approche, je me faufile vers une grosse haie qui borde le bas de la friche et la longe vers le champ semé puis contourne un petit lac entouré de bois pour remonter vers la haie qui borde la gauche de la friche mais les chevreuils ont disparu. Je remonte doucement vers le sommet du coteau et rattrape la bordure du bois. Pas un bruit, les chevreuils se sont volatilisés. Je m'avance doucement en sous-bois par les grosses coulées pour rester silencieux et tente quelques appels de Buttolo sans succès. Je descends un peu et passe devant une zone de terriers qui semblent bien fréquentés puis je longe à mi-pente dans le bois par un grosse coulée en essayant de rester silencieux et je m'arrête souvent pour observer mais rien ne bouge à part quelques merles.
Je ressors au bout du bois en essayant de ne pas faire trop de bruit mais il me faut passer une zone de branchages secs. Je sors au-dessus du bois sur le pré puis contourne le bout du bois pour repartir vers le lac quand en tournant la tête à gauche, j'aperçois un chevreuil qui sort du bois et s'avance doucement en broutant pour remonter le talus du pré. Je suis à découvert sur le pré.
Je tente de me dissimuler en reculant un maximum, jusqu'à ce que le chevreuil disparaisse derrière le relief du champ. Il semble qu'il ne m'ait pas vu. Je ne le vois plus et je remonte le talus du pré pour récupérer une cassure dans la pente bordée de touffes de ronces qui me permettront peut-être de faire une approche et de passer au-dessus du chevreuil sans qu'il ne me voit.
Je commence mon approche en longeant au-dessus touffes de ronces espacées mais le chevreuil avance trop vite et il passe la cassure pour se mettre à brouter au-dessus dans le pré alors que j'arrive juste à la dernière touffe de ronces. Je me positionne rapidement à genoux, au ras des ronces et me fige. C'est un brocard. Je suis en très mauvaise posture pour terminer mon approche, le prochain petit buisson est à au moins 30 mètres et je suis à découvert. Le brocard broute tranquillement et relève la tête de temps en temps quand, tout à coup, il regarde vers moi. "Il va me voir"... Le brocard se remet à manger comme si de rien n'était.
Comment faire ? Tout à coup, le brocard me tourne le dos, je vais tenter une approche en passant sous la cassure qui n'est pas bien haute mais en descendant assez et en avançant voûté par tranches de quelques mètres en surveillant la brocard du coin de l’œil, je parviens à rejoindre le petit buisson et me redresse derrière ce dernier pour observer le brocard qui n'est plus qu'à 25 mètres environ, sur ma gauche.
Il est encore un peu trop loin pour moi, mais il se décide à bouger et biaise pour venir passer en face de moi. Il se rapproche doucement en s'arrêtant pour manger. Petit à petit, il comble les mètres qui me manquaient. 15 mètres, au pas, j'arme mon arc alors que son attention est ailleurs. Je pense le voir se rapprocher encore mais il oblique un peu et s'éloigne doucement pour s'arrêter à environ 17 mètres pour brouter. Je prends la visée mais hésite un peu, ce n'est pas ma distance de prédilection, le terrain remonte un peu... Je prends tout de même la décision de tirer. Mon viseur se cale sur son coffre, je décoche.
Je ne vois pas l'impact mais l'entends clairement sans pouvoir vraiment identifier mon atteinte. Le brocard démarre et revient vers le bois pour s'arrêter 40 mètres plus loin. Il se fige sur ses 4 pattes très écartées et se met à trembler, son cou décrit des cercles et je m'attends à le voir tomber d'un moment à l'autre. Sa respiration est difficile et il émet des râles très sonores. Je pense à une flèche de poumons mais le temps passe et le chevreuil reste sur place sans vouloir se coucher et la nuit tombe doucement. Je reste immobile à genoux et attends. J'ai rendez-vous avec Laurent à la voiture à la nuit et je décide de lui envoyer un SMS pour l'avertir de la situation. La lumière du portable m'éblouit un peu et au moment où je le range, je n'arrive plus à voir le chevreuil dans la pénombre. Il est tombé ou s'est enfuit ?
Je me redresse et me rapproche doucement du dernier endroit où je l'ai vu mais il n'y est plus. Il fait nuit et ma visibilité est très réduite. J'aperçois tout de même une masse sombre un peu plus loin. Je me fige et force mes yeux. C'est mon brocard, il s'est couché 15 mètres plus bas et fait toujours des cercles avec sa tête. Il me tourne le dos. Je tente une approche, très très lentement, à découvert, je gagne des mètres pour tenter une flèche d'achèvement. 10 mètres, j'arme mon arc mais il fait nuit noire et impossible de prendre la visée, j'avance encore un peu, 8 mètres, toujours impossible d'aligner la visée, 6 mètres, je prends la visée au jugé mais le chevreuil se relève et détale sur 15 mètres pour se recoucher en râlant à quelques mètres de la bordure du bois.
Je change de technique, je descends contre le bois et le longe doucement. Arrivé à 5 mètres du chevreuil, j'arme doucement et lui décoche une flèche au jugé. Le chevreuil se redresse et file vers le bois ou je le perds de vue mais entends sa chute puis ses derniers soubresauts dans les ronces. Je me rapproche doucement à la lueur de ma lampe et le retrouve à 10 mètres environ de mon dernier tir, mort au bord du bois.
Ma première flèche rentre en fait dans le cou, 15 cm sous la tête et ressort entre les mandibules inférieures d'où cette difficulté à respirer. Ma seconde flèche rentre dans le cuissot et s'arrête dans l'épaule. Je mets le bracelet et charge le chevreuil sur mon dos pour retourner à la voiture. Je reviendrai demain chercher ma flèche.
Le lendemain matin, je laisse Laurent et Christophe venu chassé aujourd'hui sur leurs lieu de chasse et pars chercher ma flèche. Je la retrouve rapidement fichée au sol.
La piste de sang est presque inexistante jusqu'au premier arrête du chevreuil ou ses mouvements de tête ont dessiné un 8 au sol.
Et du premier au second arrête, je ne trouve pas non plus de sang, par contre la seconde reposée et bien marquée.
Toujours pas de sang avant la troisième reposée qui elle est peu marquée.
C'est une mauvaise flèche qui se termine bien pour moi, j'ai eu pas mal de chance.
Alex
Trophée :
Atteinte :