Cette nuit, j'ai dormi chez Patrick, il est 7 heure, le réveil sonne. Je me prépare rapidement puis pars en chasse alors que les premières lueurs du jour commencent à monter derrière les montagnes. Ce matin, je vais essayer de retrouver la bande de cervidés vue jeudi matin dans les buis sous chez le voisin de Patrick. Je remonte rapidement le chemin d'accès à l'habitation puis rattrape le chemin de la Soule, je remonte les lacets jusqu'à la maison suivante puis la laisse sur ma droite et continue sur un chemin où la neige n'a pas été encore piétinée. En contre bas, à 40 mètres environ, un chevreuil broute à la cassure du talus, je ne vois que son dos mais l'approche sera impossible, je poursuis ma route. Il a gelé fort ce matin et la neige a gelé en surface et craque sous mes pas, de plus à chaque enjambée, je m'enfonce jusqu'au genou ou à mi-cuisse. La progression est très difficile et très bruyante. J'ai peu d'espoir de voir des animaux pour le moment et me concentre sur ma progression.
Au bout de 300 mètres de cette marche éprouvante, j'arrive au bord d'une zone de buis où le chemin s'interrompt. De nombreuses traces d'animaux convergent vers ces buis et je décide de les suivre. La neige est maintenant moins profonde, les animaux ont gratté par endroit la neige pour chercher de quoi manger. Les traces de sangliers côtoient les traces de biches, de cerfs, de chevreuils, de blaireaux et de renards. Un sanglier a dessiné un sillon de presque 1 mètre sur 50 mètre environ dans la neige profonde. Je suis sa trace pour éviter de trop m'enfoncer et redescends vers un petit ruisseau grossi par la fonde de cette neige. Dans mon dos le soleil qui se lève, éclaire la barre rocheuse qui se teinte d'une belle couleur dorée.
Je descends en suivant le ruisseau, la pente très prononcée et la glace rendent la décente un peu périlleuse et je chute régulièrement dans la neige.
Je fais quelques pauses pour observer les alentours et tenter d'apercevoir des animaux. La nature est calme.
Un peu plus bas je tombe sur un enchevêtrement de chênes abattus par-dessus le cours d'eau par la tempête de 2009 et en profite pour traverser le ruisseau en marchant sur les troncs. De l'autre côté du ruisseau, les buis sont très épais et je peine à me frayer un chemin. Je tombe alors sur une bauge fraîche d'un gros sanglier, peut-être celui que je suivais jeudi matin. Je ressors ensuite des buis épais et arrive dans un zone plus claire. Je marque un petit temps d'arrêt et observe les alentours quand j'aperçois, en dessous de moi, un hère et une belle biche à 50 mètres environ. J'attrape mon appareil photo et tente de l'allumer mais il fait un bruit bizarre et refuse de s'allumer. Le bruit n'est pas resté inaperçu. La biche démarre et rentre dans les buis épais pour traverser le ruisseau, son jeune la suit puis toute une harde de biches, bichettes et jeunes. Un gros daguet ferme la marche. Je suis dégoûte. Je regarde mon appareil photo, le bloc optique ne se déploie plus et l'appareil force un peu puis s'éteint. Bon et bien, les photos sont terminées pour aujourd'hui.
Je continue à descendre doucement pour voir de plus près la zone où se trouvaient les animaux. Tout à coup, alors que je ne suis plus qu'à 15 mètres environ d'où se trouvait le hère, un mouvement sur ma gauche attire mon regard. Je me fige et me prépare. Un petit hère arrive d'un pas décidé, j'arme mon arc. Il s'arrête une première fois derrière des buis puis repart et vient s'arrêter juste en dessous de moi à 15 mètres environ. Mon pin's est calé sur son coffre mais je ne suis pas là pour lui et je le laisse repartir. Il disparaît dans la bande épaisse de buis qui longe le ruisseau. Au même moment, les animaux, qui s'étaient semble t-il arrêtés, repartent en cassant du bois. Je m'avance rapidement dans la clairière en dessous de moi pour tenter d'apercevoir les animaux dans leur fuite. J'aperçois alors une harde de plus de 20 animaux qui remonte la pente après le ruisseau.
La clairière est presque totalement déneigée par les grattages des animaux et jonchée d’empreintes. Je recontrôle mon appareil photo et tente de débloquer le bloc optique quand un bruit me fait tourner la tête. Il me semble apercevoir un mouvement au travers des buis sur ma gauche. Je range mon appareil photo et me fige pour observer. Au bout d'un moment, ça bouge à nouveau. J'aperçois le dos puis les pattes d'un animal à 50 mètres environ. Je pense qu'il s'agit d'un chevreuil. Patrick qui n'a pas encore fermé son bracelet m'a dit d'en tirer un si l'occasion se présentait. Que faire ? Je suis à découvert et le sol gelé est craquant. Je décide de rester là où je suis un petit moment. Le temps passe et l'animal ne semble pas vouloir bouger quand, tout à coup, il finit par se décider et commence à descendre la pente pour rejoindre un massif de buis. J'aperçois alors la tête de l'animal, c'est un daguet et à ma grande surprise un autre daguet que je n'avais pas vu le suit. Ils rentrent dans les buis tranquillement.
Un couloir dans la végétation en contrebas peut me permettre un tir, je décide de m'avancer tout doucement et me positionne en haut d'un talus, devant ce couloir en espérant voir passer les daguets à distance de tir mais assez rapidement du bruit attire mon attention sur ma gauche, vers les buis. Un beau Cerf portant 6 cors, remonte et sort des buis. J'arme mon arc mais il est un peu loin. Il marque une courte pause puis remonte la pente suivi par un second jeune cerf. Ils passent derrière un gros arbre mort et s'arrêtent régulièrement avant de disparaître derrière la crête un peu plus loin. Je désarme mon arc, je n'ai pu que les regarder partir impuissant. Le tir n'était vraiment pas raisonnable puis impossible. Je tente de m'avancer pour les retrouver derrière la crête mais ils sont déjà loin.
Je reprends ma progression lente pour revenir vers chez Patrick. Au bout d'un moment, je passe une combe non boisée puis remonte dans le bois de chêne clairsemé. En arrivant près d'une zone de buis, j'entends démarrer des animaux. J'arme mon arc, 3 chevreuils s'arrêtent à découvert à 30 mètres au-dessus de moi. Trop loin, je les laisse repartir et désarme mon arc. Je reprends ma progression et perçois un peu plus loin un beau brocard en velours qui remonte dans la combe suivante. Je profite du relief pour tenter de remonter à couvert derrière la crête et lui couper la route un peu plus haut. La pente devient très raide et très glissante et je peine à progresser discrètement. Arrivé au sommet de la combe, je tente d'apercevoir le brocard mais il est déjà en train de m'observer. Il démarre sur le chemin qui passe sous chez Patrick. Il s'arrête plusieurs fois pour regarder en arrière puis se jette dans la pente et disparaît. Je tente de m'approcher doucement mais je ne le reverrai pas. Je remonte chez Patrick, Je ne peux pas rester faire le coup du soir, je ne flécherai pas mon cerf cette année. C'était ma dernière saison de chasse au cerf car l'an prochain je ne reprendrai pas de bracelet. Prélever un cerf à l'arc était un rêve, je l'ai réalisé grâce à Patrick mais cette chasse ne me fait plus autant palpiter et le prix du bracelet est vraiment déraisonnable.
Alex