Ce soir, je retourne à Sarrancolin pour essayer de flécher mon cerf, je ne l'ai pas encore vraiment chassé cette année faute de temps et d'envie, Patrick a repéré 2 daguets au même endroit 2 soirs de suite. Mercredi soir, ils étaient accompagnés d'un jeune 6 cors et hier soir ils étaient tous les 2. Il semble qu'ils se trouvent vers 18 heures à 18h30 autour d'une petite ruine juste au-dessus de la route.
Je décide donc de tenter un affût ce soir pour tenter d'en flécher un. Arrivé vers 16 heures chez Patrick, nous discutons un moment puis je pars en chasse, pensant me camoufler dans la ruine, je n'ai pas pris ma tenue camo-neige. Je remonte le chemin d'accès à la maison de Patrick puis prends le chemin de la Soule comme pour redescendre vers le village. Le vent est face à moi. Un peu plus loin, j'arrive sous la petite ruine et escalade le talus au-dessus de la route pour aller m'y poster. Je n'ai jamais examiné cette ruine de près et j'en fais doucement le tour pour trouver un poste.
Mon premier choix, à l'intérieur de la ruine n'est pas judicieux : Si le daguet arrive au-dessus de la ruine, il peut me voir et s'il arrive au-dessous, l'encombrement des branches est trop important pour tirer dans de bonnes conditions. Je ressors de la ruine et reviens sur mes pas pour me poster derrière cette dernière, je me poste tout d'abord derrière l'angle bas mais me rends compte que je suis trop à découvert sur ma droite
et trop encombré devant moi,
je me poste donc derrière l'angle haut. Il est environ 17h20.
Sur le flanc opposé de la montagne, des coups de feu espacés résonnent dans toute la vallée.
Un chasseur qui doit régler son arme, je crains que ce remue-ménage fasse peur aux animaux. J'attends un peu puis décide de changer de poste, je ne sens pas mon poste actuel. Les coups de feu résonnent toujours à la même cadence. Je décide de suivre les traces des animaux dans la neige pour voir d'où ils viennent et trouver un poste pour les intercepter. Les traces se divisent alors que je sors du petit bosquet qui entoure la ruine. Une partie longe au-dessus et sur le chemin en contrebas, le long d'une bande boisée qui rejoint le bois au-dessus de la résidence secondaire de Tahouens. Une autre partie remonte pour passer au-dessus d'un bouquet de houx qui ferait un bon poste mais je décide de suivre les traces du bas pour me poster dans le bois.
Je me cale tout d'abord derrière un gros buis mais après un petit moment je ne sens toujours pas ce poste, je me décale derrière un gros chêne mais toujours pas le bon feeling. Je retourne sur mes pas et me poste finalement derrière le bouquet de houx. Je juge mes angles de tir à gauche
puis à droite.
Il est 18 heures, les coups de feu résonnent toujours et me font sursauter. Des mésanges volent d'arbre en arbre puis viennent se poser juste devant moi dans les houx avant de repartir. Quelques corbeaux arrivent dans mon dos en coassant pour regagner le bois devant moi pour y passer la nuit.
Le temps passe et le froid se fait piquant, mes pieds gelés me font souffrir et mes mains regagnent tour à tour mes poches pour se réchauffer un peu. 18h30, la voiture de Patrick descends le chemin de la Soule alors qu'un dernier coup de feu trouble le calme qui s'installait. Des merles sortent du bois peut être dérangés par un animal ? L'attente est longue dans le froid mais vers 18h40, un bruit me sort de ma torpeur. Un gros daguet se tient en crête à 40 mètres environ devant moi, sur ma gauche. Un second le rejoint et un combat commence. Tête contre tête, les 2 jeunes mâles tournent autour d'un axe imaginaire puis l'un d'eux renonce et descend.
Je le perds un instant de vue derrière les houx puis il revient à la charge et se fait à nouveau repousser. Cette fois, il descend un peu plus et rejoint une biche que je n'avais pas vue. Le vainqueur reste campé sur sa position alors que la biche et l'autre daguet commencent à venir droit sur moi. Ils se rapprochent d'un pas tranquille en émettant de petits sons comme pour communiquer puis s'arrêtent à environ 10 mètres derrière les houx. Ils semblent vouloir passer au-dessus de moi et je me tiens prêt à armer quand, tout à coup, le pas du jeune cerf se fait à nouveau entendre dans la neige. Je l'aperçois au travers des branchages, il va passer sous moi. Je pivote doucement et arme mon arc. Je suis prêt, mon viseur le suit au travers de la végétation...5 mètres, 4 mètres, 3 mètres. Il s'arrête, 3/4 face... le temps de prendre la décision de lâcher ma flèche, il regarde vers moi au moment où une bourrasque de vent souffle mon odeur vers ses naseaux, il fait brusquement volte-face et s'arrête plein travers à 10 mètres mais pile derrière les houx.
Je ne peux plus tirer, je désarme. Une fraction de seconde d'hésitation vient de me coûter cher. La biche est de face devant le daguet. Ils regardent un moment vers moi puis démarrent brusquement et rejoignent le second daguet. Tout ce petit monde regarde un moment vers moi, la biche curieuse prend même le risque de revenir un peu vers moi puis un des daguets passe la crête puis les autres le suivent.
La nuit tombe, je peste d'avoir laissé passer ma chance alors que tout semblait se dérouler à merveille. Mes pieds me font atrocement souffrir et le chemin du retour ne sera pas une partie de plaisir. Peut-être que je serais meilleur demain à l'approche.
Alex