Ce soir, Vers 18 heures, je sors du boulot en courant et je me dépêche de rentrer. 10 minutes de route, je me change en vitesse et me voilà parti. 18H45, j’arrive sur mon lieu de chasse, un magnifique territoire peu chassé et couvert de bois de chênes bordés de genets épais et entrecoupés de langues étroites de prairies naturelles. Au milieu des bois, un lac dont le déversoir, petit ruisseau, est très fréquenté par les sangliers, les souilles y sont très nombreuses.
Je stoppe ma voiture dans la cours du propriétaire des lieux et après avoir fini de m’équiper, je file à grande enjambée vers le lac, je n’ai pas fait 300 mètres que je dérange 5 chevreuils au gagnage. Le brocard, la chevrette et ses 3 petits, ils rentrent au bois dans un craquement de bois sec, je continue à courir un peu et j’aperçois à 200 mètres un autre brocard qui broute tranquillement.
Je n’ai pas de bracelet mais je décide d’essayer une petite approche pour me mettre en jambe. Il est à une trentaine de mètres de la bordure du bois qui est lui-même bordé d’une haie de genets qui fera un parfait écran de camouflage. Je parviens à rejoindre cette haie sans être repéré, mon chevreuil est de cul, je commence mon approche mais même en faisant de mon mieux, je ne parviens pas à marcher sans bruit à cause de la végétation sèche et mon approche se termine à 35 mètres environ du brocard. Il vient de repérer un crissement et après un moment à regarder dans ma direction sans me voir, il finit par s’enfuir vers le bois.
Je reprends un pas rapide jusqu’au lac, j’escalade le talus du coteau qui surplombe le lac et commence à progresser à pas feutrés au milieu des genêts, des genévriers et des chênes pour rejoindre une bande de genets en demi-lune où plusieurs fois déjà j’ai aperçu les sangliers.
Du haut du coteau, je peux voir deux chevreuils brouter paisiblement au bord des genêts, signe que rien ne bouge encore à l’intérieur, deux autres pâturent sur le coteau d’en face. Je poursuis ma progression pour arriver sur un chemin qui redescend au bas des genets et les sépare du bois de chênes clair semé dans lequel je progresse.
Je prends ce chemin sur 30 mètres pour bifurquer sur une très grosse coulée qui traverse la zone de genets. Ma progression est très lente, je marque de nombreux arrêts pour espacer les bruissements de feuilles au maximum et les faire passer pour un mouvement de campagnol, très nombreux dans le coin et surtout très brillants par intermittence. Mais, 300 mètres plus loin, alors que je me faufile entre 2 buissons, je suis repéré par un gros brocard que je n’avais même pas vu à 10 mètres de moi. Il fuit en poussant des aboiements et en marquant de nombreux arrêts, il n’a pas réellement identifié le danger, mais il fait profiter de sa suspicion tout le voisinage et fait déguerpir les deux groupes de chevreuils que j’avais vu tout à l’heure. Je renonce à continuer au milieu des genets qui s’épaississent de plus en plus.
Je traverse la bande de genets qui me sépare de la langue de prairie pour longer le ruisseau alimenté par le déversoir du lac. Le relief en cuvette fait souvent tourner le vent mais, ce soir, il est constant et de face. Sur le retour, je me retrouve avec le vent de dos. J’avance sans trop y croire quand, au niveau du chemin de terre, j’entends un raffut de tous les diables dans le bois au-dessus des genêts, puis des grognements, des couinements et des souffles puissants qui se dirigent droit sur moi.
Après plusieurs hésitations, je décide de me positionner derrière des buissons noirs, à bon vent par rapport aux trois sorties des coulées qui traversent les genets dans la direction que vient de prendre la harde. Au milieu d’un clair, j’aperçois un sanglier qui me semble de bonne taille, ils sont à 50 mètres mais le bruit se rapproche de plus en plus jusqu’à ce que j’aperçoive la tête d'un sanglier pointer à 20 mètres de moi au bord des genêts. J’arme lentement mon arc mais, au même moment, une dizaine de marcassins de 10 à 15 kg sortent de la végétation.
C'est une laie meneuse, je reporte donc mon choix vers un des petits mais ils n’arrêtent pas de bouger et ne se présentent jamais bien. Ils s’éloignent, mes chances de réaliser un tir s’amenuisent, je désarme. Mais ils semblent revenir, je réarme quand un autre sanglier, une laie non suitée cette fois sort à son tour, j’ajuste mon viseur, elle est à 10 mètres environ et je décoche. Ma flèche part bien mais la corde vient frapper la manche de ma chemise ce qui provoque la fuite de la compagnie. Il me semble tout de même voir ma flèche frapper le sanglier en plein coffre juste avant qu’il ne fasse volte-face puis le voir s’enfuir avec la flèche plantée mais le doute m’envahit.
Il me semble aussi avoir entendu un bruit d’os et non le bruit sourd d’une flèche de coffre. Je laisse tout ce petit monde s’éloigner. 5 minutes passent puis 10 et il fait pratiquement nuit, suffisamment en tout cas pour ne plus voir les traces de sang éventuelles.
Je pars donc chercher une lampe pour regarder s’il y a des traces de sang au départ. Je reviens 30 à 40 minutes plus tard mais mes recherches restent vaines, pas de sang, pas de flèches, je ne vais pas plus loin que la bordure des genets et je rentre pour contacter le conducteur de chien de sang. Mes doutes sont de plus en plus importants. Pas de sang, aucune trace et ce bruit de fracture qui résonne dans ma tête. Le rendez-vous est pris pour midi. Ce matin, en sortant du boulot, je retrouve le conducteur de rouge qui habite seulement à 5 minutes de mon lieu de tir.
Nous arrivons sur place, je prends la laisse du «chien forceur» et lui celle du teckel. A l’endroit du tir, pas de sang. Le chien tourne et retourne pour finir par trouver du sang 50 mètres plus loin. Le conducteur me demande de le suivre et alors que je sors des genets j’aperçois mon sanglier, 30 mètres plus haut et en averti le conducteur qui concentré sur le travail du chien ne l’avait pas vu.
Le teckel part complètement à l’opposé mais nous décidons de le laisser faire. Il va faire 10 mètres puis revenir en arrière en obliquant quasiment à 180° et arriver sur le sanglier qui avait roulé dans la monté sur 10 mètres et s’était arrêté contre un petit chêne. Félicitations au chien et nous rentrons. Moi qui n’y croyais pas, je rentre avec un sanglier de 60 à 65 kg. Ma flèche est très bien placée, elle rentre au-dessus du cœur au niveau des poumons et s’arrête dans l’os de la patte opposé malgré mes 65 livres.
Alex
Atteinte :