Ce soit vers 16h30, je pars pour Traversères. En arrivant sur place, je constate que le vent assez fort est orienté du sud vers le nord. Je vais donc chasser à contre vent. Je pars vers le nord pour contourner et revenir vers les genets où se gîtent généralement les sangliers. Les vaches et le cheval me regardent passer. Les sangliers sont passés récemment, la prairie est marquée de coups de nez, je descends vers le bois au-dessus du lac quand un mouvement sur ma droite attire mon regard.
Un animal à la robe claire s'avance au milieu des genets et des genévriers du soulan d'en face. Il est bien à 300 mètres mais je suis presque certain qu'il s'agit d'un daim. C'est le premier que je vois sur le secteur mais quelques individus échappés de parc se promènent dans le coin. Je vais tenter de me rapprocher un peu. L'animal avance toujours tranquillement alors que je descends vers le bois à découvert.
Tout à coup, il stoppe et regarde vers moi, je fais comme si je ne l'avais pas vu et je poursuis ma route. Arrivé en haut d'un talus boisé qui domine le fond de la combe enherbée, je longe en haut du talus derrière les chênes pour tenter de voir l'animal de plus prêt. Je parviens à 150 mètres environ, le daim, car cette fois je n'ai plus de doute, n'a pas bougé et regarde toujours vers moi.
J'essaie de ne pas me faire voir et fais demi-tour puis descends le talus boisé hors de sa vue, traverse le fond de combe et me colle aux genets pour avancer caché et dépasser le daim car le vent est dans mon dos. Je surveille au travers des genets et l'aperçois toujours dans la même position à 80 mètres au-dessus de moi. Je continue à longer les genêts, voûté au maximum puis une fois le daim dépassé je remonte doucement à travers la végétation par les coulées.
Je ne retrouve pas le daim mais tout à coup à 35 ou 40 mètres, je l'entends qui s'enfuit et passe la crête. Je tente de le suivre doucement mais la crête passée, impossible de le retrouver. Je n'ai pas bien vue sa tête et je ne sais pas de quel sexe il s'agit. Peut-être nous recroiserons nous un jour.
Je redescends à travers bois vers la combe suivante coupée en deux par un ruisseau toujours à sec et bordé d'une haie épaisse. 2 coups de feu retentissent, ça vient de la palombière un peu plus haut. Je passe la haie et longe entre le bois d'en face et la haie pour revenir vers le lac. Arrivé au bout de la haie, j'aperçois une chevrette et son petit qui détalent. Il traverse une grosse haie au passage un peu plus loin puis disparaissent derrière cette haie.
Je poursuis et arrive au lac que je longe pour arriver au pied de la digue où commencent les genets. Le propriétaire est entrain de déplacer la clôture des vaches, elle barre maintenant le passage qui descend aux genets. Je passe dessous et avance doucement entre le bois au-dessus de moi et les genets sur un passage girobroyé. Je jette un coup d’œil dans le passage qui descend au ruisseau où se trouvent de nombreuses souilles,
rien, je continue en essayant d'éviter les gland craquants, les branchettes et les feuilles mortes qui jonchent le sol. Des pieds de sangliers assez frais ont marqué le sol.
J'avance toujours doucement quand, tout à coup, juste à ma gauche dans les genêts, un sanglier souffle et démarre. Il était prêt à sortir sur le chemin et je l'ai tourné. J'attends un peu puis continue à avancer doucement quand des craquements se font entendre en sens inverse. Le sanglier semble partir vers les souilles. Je fais demi-tour et le plus rapidement possible, mais tout en essayant de rester silencieux, Je surveille dans les clairs des genets sans rien voir et reviens à l'angle du passage qui descend au ruisseau où je me poste un moment les oreilles grandes ouvertes. Le vent dans les feuilles, la chute des glands... les bruits parasites ne manquent pas et je finis par renoncer à ma position.
Je décide de reprendre mon approche à bon vent mais, alors que je viens de faire 30 mètres, j'aperçois 3 sangliers entrain de fouiller le sol dans le pré d'en face au ras des peupliers. Demi-tour, je rejoints rapidement le ruisseau et l'enjambe pour remonter vers les sangliers en suivant la bordure des ronces qui bordent les peupliers. Je finis par apercevoir 2 sangliers mais ils sont plus haut que je ne l’espérais et en plein découvert. Comment faire pour les approcher ?
Une bande de petits massifs de ronces barrent le pré en diagonale
et mon seul espoir est que les sangliers passent au-dessus des ronces mais assez près de ces dernières pour ne pas me voir approcher. Ils sont à 70 où 80 mètres et avancent vers les ronces en fouillant le sol. Je finis par identifier une bête rousse de 30 à 40 kg, une laie de 50 à 60 kg, suitée de 5 marcassins pas bien gros que je n'avais même pas vu jusqu'alors et un ragot de 60 à 70 kg. Je vais donc porter mon attention sur le ragot ou la bête rousse.
Les sangliers passent derrière les ronces, je m'élance à découvert pour rejoindre les ronces mais les sangliers sont à nouveau à découvert. Je m'accroupis et reste immobile espérant passer inaperçu, les sangliers repasse à couvert, j'avance doucement sans me redresser mais le ragot que j'aperçois trop tard vient de me repérer.
Je me fige. Il est face à moi et m'observe. Il s'avance doucement vers moi en me fixant et tente de m'identifier puis devient nerveux et commence à s'éloigner en longeant au-dessus des ronces puis accélère, entraînant le reste des sangliers. Je me redresse et cours vers les ronces pour les longer rapidement espérant couper la route aux sangliers mais ils vont trop vite et ils rentrent dans le ruisseau bordé par une haie, plus ou moins épaisses, de chênes et de buissons noirs.
Je m'avance rapidement, espérant qu'ils sont toujours dans le ruisseau. Arrivé au niveau de l'entrée, mais en restant à 15 mètres en retrait de la haie, je les entends démarrer. Ils longent dans le ruisseau et je les suis le plus vite possible en essayant de rester silencieux pour essayer d'arriver avant eux à une trouée dans la haie. Ils s'arrêtent régulièrement, certainement pour écouter avant de repartir de plus belle. Leurs pas dans les feuilles mortes où l'eau du ruisseau sont très bruyants et faciles à identifier.
J'arrive trop tard à la trouée, j'entends les sangliers remonter le talus du ruisseau et en aperçois un qui traverse le pré pour rentrer dans les genets.
Je le laisse rentrer à couvert puis je traverse le ruisseau et le remonte un moment presque en courant pour rattraper un bout de chemin forestier qui remonte au bout des genêts. Je rentre ensuite dans les genets pour rattraper une grosse coulée qui longe dans les herbes hautes au-dessus de la bande très épaisse des genêts.
Un merle effrayé me passe juste au-dessus de la tête. Je finis par rejoindre la grosse coulée qui remonte dans le bois et me fige pour écouter. Un sanglier souffle à 20 mètres devant moi mais impossible de le voir dans cette végétation épaisse.
Quelques craquements, encore un souffle puis le calme s'installe et la pluie commence à tomber. J'attends un peu mais la nuit tombe. En face, à 400 mètres environ, au-dessus de la route d'accès à la ferme, une silhouette élancée s'avance dans les hautes herbes sèches, tantôt au trop, tantôt au pas, s'arrêtant régulièrement... je reconnais rapidement la démarche d'un chevreuil.
Je m'éclipse, il fait trop sombre pour tenter une flèche, je ressors des genets puis traverse le pré et le ruisseau pour revenir par le pré où se trouvaient les sangliers, vers ma voiture. Tout à coup dans l’obscurité, le chevreuil me passe tranquillement à 20 mètres pour rentrer dans le ruisseau. Je retourne à la voiture... Les sangliers ont encore gagné, comme chaque fois cette année sur ce territoire.
Alex