Ce soir, je pars pour Traversères pour faire un affût au sanglier sur mon poste fétiche. Je me gare près des ruches, au-dessus du lac puis pars à pied par le chemin de terre. Un peu plus loin, je coupe à travers la parcelle cultivée en agroforesterie et remarque une forte activité des sangliers. De nombreux coups de nez qui semblent assez frais attestent de la présence des animaux. Je traverse le chemin et m'avance dans un petit semé de blé pris entre la colline boisée à ma droite et un ruisseau asséché et bordé d'une haie à ma gauche. Je biaise vers la colline et quitte le semé pour m'avancer dans la bande de friche qui borde le bois de petits chênes et de genévriers.
Je suis une grosse coulée très marquées par des pieds de plusieurs sangliers. Les geais cris dans le bois sur ma droite.
Une petite souille à l'eau encore boueuse me donne confiance. La coulée descend, un peu plus loin dans une creux qui s'avance dans le bois. Je prends à droite pour remonter dans le bois mais dois traverser quelques arbustes.
C'est alors qu'un énorme lièvre démarre à quelques mètres devant moi pour rentrer au bois.
Je le regarde s'éloigner puis rejoints le bord du bois et rentre par une belle coulée qui suit le fond d'une belle combe, les feuillages sont couverts de terre, les sangliers passent régulièrement par là.
Un peu plus loin, la coulée prise dans la végétation débouche sur une zone ouverte, les sangliers y ont fouillé de frais les tas de feuilles mortes.
Je continue mon chemin, la coulée passe par un passage encaissé au travers de branches basses
puis se divise en plusieurs coulées plus ou moins marquées qui remontent dans la combe. Je commence à suivre l'une d'elles pour rejoindre mon poste un peu plus haut quand il me semble entendre du bruit. Je stoppe et tends l'oreille. Des animaux ont démarré un peu plus haut sur la droite. Je lève les yeux et entraperçois plusieurs sangliers qui filent en suivant la crête tout en poussant des souffles puissant.
Je ne m'attendais pas à les voir là, cela fait des années que je ne les avais pas vu se giter dans ce secteur. Le calme revenu, je finis de rejoindre mon poste à une cinquantaine de mètres plus à gauche, en bordure du sale. J'espère que d'autres sangliers sont gités dans le secteur. Je suis tourné vers le haut de la combe, le vent tourne par moment passant de face à moi à plein travers sur ma gauche. Il est 18h30, l'attente commence. Je surveille tout autour de moi, vers 18h45, un mouvement attire mon attention sur la crête. Plusieurs sangliers, dont un très gros, avancent tranquillement en suivant la crête dans mon dos. Je les observe quand ils décident de bifurquer et descendre à travers les genévriers. Le plus gros, certainement une laie, semble diriger les autres en grognant. Ils biaisent vers la passage encaissé et je les perds de vue. Je suis leur progression un instant à l'oreille dans la végétation puis le calme revient.
J'attends un peu puis le retourne vers le haut de la combe. Rapidement, il me semble entendre du bruit dans la végétation à ma gauche. Une grosse martre en surgit dans mon dos et s'avance en faisant des bons. Je me retourne doucement mais elle stoppe à environ 3 mètres, se dresse sur ses pattes arrière, hume l'air puis détale à grands bons, bifurque en prenant le appui des 4 pattes sur un tronc puis fait encore quelques bons pour disparaitre dans la végétation. Je tente de la rappeler mais elle ne revient pas. J'attends un peu immobile quand un animal revient vers moi par le bas de la combe. Ses pas se rapprochent dans la végétation mais je ne peux pas le voir. Il est tout près quand le bruit stoppe. Je reste immobile à l'écoute et observe le secteur mais plus rien.
Après un moment, je me retourne à nouveau vers le haut de la combe. La luminosité commence à baisser en sous-bois. Un animal arrive à nouveau dans mon dos, je me retourne doucement, un sanglier d'environ 50 kilos arrive par la coulée par laquelle je suis monté à mon poste. Mon décocheur est accroché, il avance tranquillement. Il n'est plus qu'à 25 mètres, je commence à monter doucement mon arc pour l'armer mais le sanglier stoppe net, relève la tête, grogne et fait volte-face pour retourner en un éclair d'où il vient. Je reste immobile, très rapidement, des bruits de pas se font entendre. Un autre sanglier, plus gros arrive en suivant la bordure du sale sur ma gauche en remontant du bas de la combe. Il se rapproche tranquillement. Il est à environ 40 mètres et semble remonter vers la crête mais il bifurque pour prendre une belle coulée qui passe à moins de 10 mètres de mon poste. Je le perds de vue à environ 20 mètres derrière des genévriers. Je suis prêt à armer et l'attends sur la gauche des conifères mais il bifurque à angle droit et ressort sur ma droite et se plante de 3/4 face. Il regarde vers moi. Je reste immobile, il s'avance de quelques pas, je monte doucement mon arc mais il démarre brusquement en grognant et stoppe à 50 mètres de 3/4 arrière un court instant qui s'éloigne bruyamment dans la végétation.
La nuit sera vite là. Quelques minutes plus tard, plusieurs sangliers arrivent dans la végétation sur ma droite, je me retourne doucement vers le haut de la combe mais il fait presque nuit et les animaux passent dans le sale sans que je puisse les voir. J'attends un peu le retour total du calme puis quitte discrètement mon poste, il est temps de rentrer après cet affût riche en émotions même si les sangliers ont été plus forts que moi.
Alex