Ce soir, le ciel est nuageux, il ne fait presque pas de vent, je décide d'aller me poster à Traversères sur mon poste à sanglier où j'ai pu flécher un beau mâle le mois dernier. En arrivant, vers 17h15, je constate que les sangliers sont passés de frais, la végétation est couverte de boue, le sol a été fouillé, les arbres ont été frottés et portent des coups de dent. En m'installant à mon poste, derrière le genévrier mort tombé au sol, je constate qu'un sanglier a eu l’audace de venir se soulager pile où je m'installe habituellement. Le laissé a quelques jours, il n'est pas frais. Je me cale, face à la pente, débarrasse le sol de ses feuilles mortes pour pouvoir pivoter sans bruit, contrôle le vent, très léger qui vient de ma gauche et descend légèrement, en émiettant un bout de lichen. L'attente commence.
Les campagnols agitent brillamment le sous-bois en courant sur et sous les feuilles mortes. L'un d'eux joue à cache-cache devant moi, courant sur quelques mètres à découvert avant de plonger sous les feuilles mortes pour ressortir un peu plus loin son museau, observer un instant avant de partir de recacher un peu plus loin. Un peu plus tard, un épervier vient se poser à environ 35 mètres sur ma droite sur un chêne. Le temps passe, un peu avant 18 heures, un bruit de pas se fait de plus en plus présent dans mon dos. Ce n'est un campagnol, je me retourne doucement et me prépare en accrochant mon décocheur.
2 petits grognements timides retentissent. Le sanglier se rapproche dans le sale en dessous de moi sur la droite et je m'attends à le voir déboucher devant moi. Je suis prêt et croise les doigts pour que le vent ne tourne pas mais le sanglier biaise dans le sale et semble vouloir passer sur ma droite. Je pivote doucement pour me tourner vers une trouée dans la végétation où j'espère le voir passer.
Les bruits de pas s’espacent doucement puis s’interrompent. J'attends un moment en tendant l'oreille, espérant entendre ou voir l'animal mais le calme s'installe. Je me retourne à nouveau face à la pente, la luminosité baisse vite quand des bruits de pas et des craquements retentissent sur ma droite. J'aperçois rapidement un gros sanglier qui descend sur moi dans un couloir dégagé qui remonte vers la crête au travers du sale. J'arme doucement mon arc alors que le sanglier arrive à environ 15 mètres. Il stoppe à environ 8 mètres plein travers au pied d'un arbre frotté, j'aligne ma visée mais quelques branchettes me gênent pour décocher. Le sanglier avance de quelques pas et stoppe à nouveau. Je cale ma visée et décoche. Je n'ai pas entendu d'impact franc mais le sanglier fait volte-face et fonce pour remonter vers la crête alors que d’autres sangliers plus petits que je n'avais pas vu se dispersent dans les fourrés. Très rapidement mon sanglier percute violemment un arbre que je vois bouger puis s'agite un peu dans le sale. Une respiration mouillée se fait entendre puis le calme s'installe. J'attends un instant au poste au cas où un autre sanglier se présenterait mais la nuit s'installe. Des sangliers passent à environ 20 mètres sur ma droite en grognant mais impossible de les voir dans la pénombre grandissante. Je quitte mon poste et m'avance vers l'endroit du tir où je retrouve ma flèche posée au sol.
En la saisissant, je constate qu'elle est couverte de sang. Plusieurs petites gouttes de sang jonchent le sol autour de la flèche. Je la remets au carquois puis allume ma lampe à la recherche de sang mais je peine à le trouver. C'est en me retournant que j'aperçois la piste très abondante que je pensais un peu plus dans le fourré.
Une piste de sang spectaculaire et ininterrompue remonte vers la crête. Elle mesure entre 50 centimètres et 1 mètre de large et tapisse le sol et les arbustes. Je la suis sans peine.
Je retrouve vite l'arbre que le sanglier a percuté, il porte une grosse marque de sang frottée.
La piste bifurque sur la gauche dans le fourré un peu moins abondante. Un autre arbre porte un beau frotté environ 3 mètres plus loin, puis la piste redescend et je retrouve mon sanglier mort sur le flanc dans le fourré. C'est une laie qui a allaité il n'y a pas longtemps, les autres sangliers devait être ses petits. Elle n'a pas fait plus de 30 mètres. Ma flèche touche les poumons et coupe les gros vaisseaux sanguins qui alimentent le cœur.
Je dégage mon sanglier du fourré pour faire quelques photos souvenir puis appelle le propriétaire des lieux pour qu'il vienne m'aider à ramener mon sanglier.
Je l'attache par le groin et le traîne pour redescendre dans le champ travaillé en contrebas puis rejoins un chemin enherbé qui longe le champ et le traîne sur plusieurs centaines de mètres en attendant l'arrivée du propriétaire puis nous le chargeons dans la bennette du tracteur pour rentrer.
Alex