Ce soir, je décide d'aller me poster à Traversères, au bout d'une petite combe boisée. En chemin pour mon poste je dérange un chevreuil au gagnage qui rentre dans le bois vers lequel je me dirige. Je le laisse s'éloigner avant de biaiser vers le bois. Je traverse une bande de friche herbeuse et rejoins une grosse coulée qui rentre dans le bois pour suivre le fond de la petite combe. Je marche rapidement sans prêter attention au bruit car je n'ai pas beaucoup de temps avant qu'il ne fasse nuit. Tout à coup un léger mouvement, à quelques mètres devant moi, sur le tapis de feuilles mortes me fait stopper net. Mes yeux se posent sur un oiseau de dos, arrêté. Je l'observe un instant pour comprendre qu'il s'agit d'une bécasse. J'encoche doucement une flèche, la bécasse se décale d'environ 30 cm sur ma gauche puis se fige à nouveau de dos. J'arme doucement mon arc, aligne ma visée sur l'oiseau à environ 8 mètres et décoche. Ma flèche le traverse en projetant des plumes autour de l'impact et ricoche au sol pour stopper environ 20 mètres plus loin, posée au sol. La bécasse est tombée sur place sans bouger. Je m'avance rapidement vers elle au cas où mais constate que c'est bien fini pour elle, ma flèche rentre entre les ailes sous la base du cou. Je récupère ma petite prise, c'est ma première bécasse. Je récupère ma flèche un peu plus loin, la remets au carquois et réencoche.
Je pars me poster un peu plus loin, au bout de la combe sur le penchant de gauche, tourné vers la crête en U qui délimite la combe, contre un petit arbre dont quelques branches pendantes mortes vont me cacher un peu. L'attente commence, le temps passe et je me dis que rien ne va sortir avant qu'il ne fasse nuit quand des bruits de pas se font entendre. Vu le bruit, je suis sûr qu'il s'agit d'un sanglier, il me semble l'entendre arriver en crête à 40 mètres dans mon dos, je pivote donc doucement en accrochant mon décocheur. Il me semble qu'il vient vers moi dans le sale mais je n'arrive pas à le voir quand le bruit semble brusquement venir dans mon dos. Je me retourne à nouveau dans le sens initial et aperçois l'énorme masse noire qui arrive sur ma gauche d'un pas lent dans la végétation. Un gros solitaire avance vers moi, j'arme mon arc et le laisse approcher. Il stoppe dans un clair, plein travers à 5 mètres, j'aligne ma visée au défaut de son épaule et décoche. Ma lame mécanique produit une étincelle bien visible en s'ouvrant au moment où elle frappe le coffre de l'animal. Le sanglier démarre en trombe droit devant lui en fonce dans la végétation plus dense sur ma droite puis bifurque pour décrire une boucle autour de mon poste et repasser dans mon dos pour retourner dans le sale. Je suis sa fuite à l'oreille sur quelques dizaines de mètres puis le sanglier stoppe et souffle plusieurs fois bruyamment sur place avant que le silence ne s'installe.
Je reste un moment immobile à l'écoute mais rien, la nuit s'installe et je décide d'aller contrôler mon tir. Je m'avance doucement vers l'endroit du tir où je ne trouve ni flèche ni sang. Un peu plus à droite, je trouve une giclée de sang sur 2 mètres, au moment où le sanglier est rentré dans la végétation.
Il a emporté la végétation et cassé quelques branchettes entre deux gros troncs de chênes espacés de moins de 1 mètre. Après ce passage dans la végétation épaisse plus une seule goutte de sang en vue. J'ai un très mauvais pressentiment, la dernière fois que j'ai entendu souffler un gros sanglier comme celui-ci, ma flèche n'était pas rentrée à cause de l'omoplate. Je revisionne le tir dans ma tête et revois bien ma flèche au défaut de l'épaule. Je cherche un moment sans trouver la suite de la piste, je tente alors de recouper la direction de fuite de l'animal et tombe sur une belle coulée marquée de grosses gouttes de sang sur au moins 20 mètres. Vu la pente du terrain je dirai que mon sanglier descend, le sang s'arrête net et je préfère ne pas trop remuer le secteur et appeler un chien de sang car je ne suis pas du tout confiant sur la suite de ma recherche. J’appelle donc mon ami Adrien mais il ne sera pas disponible demain matin, j'appelle ensuite mon ami Lionel mais lui non plus ne sera pas disponible et son chien ne fait pas le sanglier mais il me parle d'un conducteur de chien de sang du Tarn et Garonne qui lui a retrouvé un sanglier. Je me souviens alors que j'avais pris son numéro lors d'une expo canine à Auch il y a quelques années. Je recherche donc le numéro dans mon répertoire et le contacte. Il ne pourra pas venir de bonne heure mais viendra demain matin. Je rentre donc chez moi mais je ne sens pas bien cette recherche, en général quand je ne retrouve pas mon animal seul, il est très rare que la recherche au sang soit fructueuse. Malgré ma première bécasse, je n'arrive pas à me réjouir.
Après une très mauvaise nuit, je me lève vers 6 heures et tente de m'occuper jusqu'à avoir des nouvelles du conducteur de chien de sang vers 10 heures. Il ne sera pas là avant 11h30, il a aussi demandé à un autre conducteur de venir et ce dernier doit arriver un peu avant lui. Vers 11 heures ce dernier m'appelle, nous nous donnons rendez-vous sur le parking d'Auterrive vers 11h15. Je pars à sa rencontre puis nous attendons son collègue en discutant. Il s'appelle Thierry et fait de la recherche avec des teckels. Le second conducteur finit par arriver vers 11h40, nous partons immédiatement vers la zone de recherche. Le propriétaire de la ferme m'informe qu'il y a eu des battues dans le secteur ce matin, ça ne va pas arranger mon histoire. Le temps que les conducteurs se préparent nous partons avec le jeune rouge de Bavière de Didier, Thierry reviendra chercher son vieux teckel si ça tourne mal. Ma confiance baisse de plus en plus. Je les conduis sur la zone du tir et leur montre le premier sang. Le rouge peine à prendre la voix et se disperse dans tout le bois pendant de longues minutes. Il finit par recouper la coulée avec le sang vu hier soir et la remonte. Didier nous annonce du sang en crête. Nous le suivons et effectivement le sanglier semble perdre pas mal de sang jusqu'en crête. Ce que je pensais être une descente hier était une montée. La piste semble facile à suivre et nous trouvons du sang au sol et des frottés réguliers. La piste redescend vers une friche. Le chien la suit mais le sang se fait vite rare voire inexistant.
Alors que nous cherchons à dénouer la piste, le tintement de grelots se fait entendre, 2 fox terriers arrivent vers notre penchant de bois en traversant la friche puis remonte vers une bande de ronces en haut du penchant en limite d'un plateau en prairie, pâturé par des chevaux. Arrivés au roncier les 2 chiens se mettent au ferme et donne de la voix un moment avant de se dégoûter et de baiser vers nous. Didier les interpelle pour les faire fuir avant de reprendre sa recherche. Son rouge finit par sortir dans la friche mais semble perdu, il tourne et retourne sans vraiment marquer sa recherche et finit par remonter dans le penchant opposé. Son maître le pensant perdu le rappelle et tente de refaire leurs arrières mais le temps passe et la recherche est au point mort. Didier demande à Thierry d'aller chercher son chien. Je l'accompagne jusqu'aux voitures puis nous revenons à l'endroit du tir et reprenons la recherche du départ. Caramel démêle rapidement la piste et nous conduit rapidement à l'endroit où le sang s'interrompt. Dans la première montée nous trouvons ma flèche posée au sol, marquée sur 20 cm de sang et légèrement tordue au nouveau de l'adaptateur de l'insert. Pendant ce temps le rouge a repris la piste là où son maître l'avait arrêté tout à l'heure. Didier a retrouvé 2 fois du sang en remontant le penchant boisé de l'autre côté de la friche. Le sanglier semble s'être roulé 2 fois pour colmater sa blessure. Caramel tourne un peu dans le bois mais finit par sortir sur la friche, tourne encore un peu et trouve l'entrée du penchant opposé et nous conduit sur un plateau travaillé, au-dessus, où nous attend Didier. Nous avons trouvé le sang mais sur le plateau nous ne trouvons plus que le pied et le suivons à vue derrière Caramel qui est toujours collé à la piste.
Arrivé au bord d'un chemin de terre bordant le penchant boisé suivant qui redescend vers des prés, le pied de sanglier prend à gauche mais Caramel part à droite, je le fais remarquer au conducteur mais Didier me dit de laisser faire le chien. Le teckel longe le bois et cherche l'entrée du sanglier, il rentre et sort plusieurs fois puis finit par se lancer sur une piste. Nous entrons dans le bois, traversons une bande fourré d'épines puis suivons le chien qui biaise à gauche en descendant doucement avant de faire ses arrière et de reprendre la bande d'épine en tirant comme un fou pour se mette au ferme un peu plus loin en donnant de la voix. Didier me laisse son chien qui tire comme un fou et tente d'aller au ferme mais l'animal n'est plus là et nous repartons sur la piste qui va nous faire passer dans des zones très sales. Thierry décide de lâcher son chien qui donne un moment puis se calme, seul son grelot le trahit et nous le suivons mais il semble perdu. En le suivant nous tombons sur les laissés de biche qui ne sont pas censés se trouver dans le secteur. Nous le récupérons, je pars contrôler une souille plus à droite par rapport à l'entrée en bordure du pré avec Didier. Un gros pied rentre de frai et une traînée de boue remonte vers le plateau. Nous la suivons mais finissons par la perdre. Les fox nous rejoignent et restent avec nous un moment. Nous tentons de reprendre la recherche dans le champ travaillé et cette fois Caramel suit le pied à gauche sur environ 60 mètres sur le chemin et se remet au ferme en rentrant dans le bois, au même endroit que tout à l'heure. Nous trouvons 2 beaux frottés de sang en rentrant dans le bois.
Nous reprenons le piste prise tout à l'heure par Caramel. Didier me reconfie son chien qui m'arrache les mains dans les ronces et tire comme un fou pour suivre son maître plus en avant. Nous débouchons plus bas dans semé sans trouver ni sang ni pied mais les conducteurs décident de suivre le chien qui nous amène à environ 1 kilomètre sur la commune suivante où je décide de stopper la recherche pour ne pas avoir d'ennuis avec les voisins et de toute façon un gros sanglier laisse rait un pied dans ce semé. Nous partons contrôler un autre pied sur le champ travaillé et le suivons jusqu'à l'endroit où les fox ont fait le ferme. Caramel se met à son tour au ferme puis traîne son mettre dans les ronces en donnant de la voix jusqu'au bout du roncier en direction de l'endroit où nous avons démarré la recherche. Il est près de 16h30, nous arrêtons la recherche. Je suis dégoûté, je ne comprends pas comment ce sanglier n'est pas mort. J'espère que mon interprétation de l’atteinte n'est pas bonne et que sa blessure n'est pas mortelle mais je peine à le croire.
Alex