Le lendemain, nous repartons pour le Chenevert. Nous laissons les quads au bout du chemin près du chalet proche du lac et repartons un peu en arrière pour rejoindre le sentier que nous avons chassé la veille. J’ai équipé une de mes flèches pour le tir des oiseaux car nous avons décidé d’en tirer 2 ou 3 pour les manger un midi. Nous n’avons fait que 100 mètres environ sur le sentier quand nous arrivons au niveau d’une sorte de placette où trônent fièrement 7 ou 8 tétras. Jocelyn me dit d’aller en tirer. J’encoche ma flèche équipée d’une Cut Edge et m’avance doucement vers le premier. Ce mâle me fait face et me challenge, me laissant approcher à 6 ou 7 mètres. J’arme, il passe derrière des branches basses sur la gauche du sentier, j’aligne ma visée et le voit ressortir plein travers. Je décoche le séchant sur place. Ma flèche est posée un peu plus loin sur le chemin, au milieu des autres tétras qui n’ont presque pas bougé. Je me retourne vers Jocelyn qui me fait signe d’en tirer un autre. Je m’avance doucement, récupère ma flèche et réencoche puis approche un autre tétra sur la droite du chemin. J’arrive à environ 5 mètres, arme mon arc et décoche. A nouveau, il est séché sur place puis se débat un peu au sol. Je me retourne et Jocelyn me fait signe d’en tirer un dernier. Je pars chercher ma flèche posée sur le sentier un peu plus loin, réencoche et approche un autre tétra un peu plus loin. Encore une fois, je m’approche à quelques mètres et le sèche sur place. Cette fois ma flèche est restée en travers, arrêtée par le sol. En me retournant, je vois que Jocelyn est entrain de ramasser le premier tétra mais le second a disparu et il me dit qu’il s’est relevé. Je me précipite et l’aperçois qui se coule dans la végétation. Je pose mon arc et le poursuis pour finir par le plaquer au sol dans la végétation épaisse avant de l’achever. Nous récupérons les 3 tétras et ma flèche qui est un peu abîmée au niveau de l’insert, ma Cut Edge est cassée en partie. Nous ramenons nos prises au chalet avant de repartir en chasse. J’ai fléché 2 mâles et une femelle reconnaissable à son plumage brun clair moucheté de noir alors que les mâles sont noirs mouchetés de blanc avec un beau sourcil rouge.
Cette expérience m'a dissuadé de rechasser le tétra tant cette chasse a été facile. Nous partons maintenant vers un secteur que Jocelyn a repéré sur la carte et qu’il pense prometteur. Nous passons devant le lac où nous avons appelé hier.
Nous longeons un moment le chemin en croisant plusieurs tétras toujours aussi peu farouches.
Plus loin et après avoir consulté son GPS, Jocelyn décide de prendre à gauche à travers bois. Une gélinotte se coule entre les troncs sur notre gauche.
Nous débouchons un peu plus loin sur une butte granitique couverte d’un lichen blanchâtre.
Elle domine une grande swamp située au milieu des épinettes en alignement du lac où nous avons appelé hier soir.
Jocelyn casse 3 branches d’un gros conifère mort au bout de la bute en me chuchotant : « Je m’annonce. » Il pousse ensuite un call de femelle et immédiatement un son nous répond sur la droite de l’autre côté de la swamp à environ 100 mètres : « Houow ». Je comprends immédiatement qu’il s’agit d’un orignal mâle, tends mon doigt dans sa direction et me retourne vers Jocelyn qui acquiesce. Je suis aux anges, je viens d’entendre ma première réponse. Jocelyn me fait placer sur le bord du sommet de la bute, en face d’une trouée dans les épinettes qui me permet de voir la zone plus dégagée couverte d’herbes, de petits buissons et de petits conifères.
Il se décale sur la droite et recommence à appeler, l’orignal répond à nouveau et commence à venir. Son déplacement s’accompagne de craquements dans la végétation et de cris espacés de quelques secondes : « houow houow houow…. », mon cœur s’emballe comme jamais. Je respire profondément pour essayer de me calmer. Jocelyn commence une séance de rattling accompagnée de cris de mâle qui énervent l’orignal. Il stoppe pour détruire une épinette de ses bois. Le bruit est impressionnant, je ne vois toujours pas l’animal mais, au bruit, je comprends qu’il doit avoir un beau panache.
Il reprend sa progression rythmée de craquements et de cris. Mon décocheur est accroché, ma cagoule baissée, mes muscles déjà en tension, je suis presque en apnée et commence à réguler mon rythme cardiaque. Il se rapproche tranquillement mais alors qu’il ne doit plus être qu’à 40 mètres, je sens le vent qui tourne sur ma nuque. Immédiatement nous nous regardons avec Jocelyn, l’orignal a stoppé net et fait demi-tour en donnant de la voix "houow houow houow...". Il n'a pas poussé son cri d'alerte, ce n'est pas encore perdu. Jocelyn décide de tenter de le suivre en décalé, sur le bord de la swamp au milieu des épinettes très denses en craquant du bois et en poussant des cris de mâle. Après 40 mètres environ de poursuite, l’orignal que nous entendions stoppe net et le calme s’installe. Nous stoppons, Jocelyn me chuchote : « Il nous écoute ». Nous restons un bon moment immobiles, à l'écoute, avant de décider de quitter les lieux mais, au même moment, il redonne de la voix pour se taire définitivement malgré les appels de Jocelyn. Nous nous éclipsons et revenons vers le chemin avant de tenter sans succès de le recouper plus loin. Nous progressons à travers bois et tombons sur une nouvelle butte granitique où nous décidons de nous arrêter un moment à l'écoute.
L'orignal ne donnant plus signe de vie, nous décidons de laisser le secteur tranquille pour la soirée et rentrons au camp pour manger et nous reposer un peu.
Vers 15h30, nous partons chasser en canoë à partir du camp vers un nouveau secteur. Nous accostons près d'un chalet en bordure du plan d'eau et partons à travers bois vers un autre lac. Le sous-bois d'épinette est assez clair et couvert de mousse. Près du lac nous tombons sur les reste d'une vielle installation ayant servie à pendre un orignal pour la découpe et la mise au frais de la viande. Nous ressortons du bois pour longer le lac.
La berge boueuse découverte par la baisse du niveau de l'eau laisse entrevoir de vielles souches d'arbres abattus par les castors et de nombreuses traces anciennes d'orignaux.
Certaines sont aussi grandes que ma main.
Nous nous postons un moment pour appeler sans succès.
La luminosité baissant vite, nous décidons de retourner au canoë.
Nous rejoignons notre embarcation alors que la nuit tombe.
Nous profitons d'un beau coucher de soleil sur le retour sur le lac.
Alex