Ce soir, je décide d'aller chasser à l'appeau en longeant l'Osse. Je me gare donc près de la rivière au niveau du pont de Justian puis pars en longeant le cours d'eau au bord d'un chaume de blé. Un peu plus de 100 mètres plus loin, je passe un fossé perpendiculaire à la rivière pour rejoindre une zone de peupliers entourée de haies épaisses. Je surveille les espaces entre les rangées d'arbres mais pas de chevreuil. La peupleraie précède des parcelles de blé d'épeautre plus ou moins grandes et entourées de haie. Les céréales très hautes sont couchées dans certaines zones mais la visibilité est très mauvaise et voir un chevreuil sera compliqué. Je me poste par moment pour appeler mais rien ne vient. Je finis par ressortir de ce secteur en traversant une grosse haie englobant un fossé profond. Les champs de tournesol se succèdent maintenant en suivant la rivière. Je longe doucement la bande enherbée en suivant le bord des grosses fleurs jaunes. Plusieurs pieds ont été frottés par un ou plusieurs brocards. Le vent est un peu capricieux et je suis parfois à mauvais vent. En arrivant, dans un virage de la culture, près d'une haie qui sépare cette parcelle de la suivante, je me fais surprendre par un jeune brocard daguet campé sur le talus de la rivière à moins de 10 mètres de moi. Je ne l'avais pas vu et nous nous surprenons mutuellement. Il démarre en trombe vers la haie située 30 mètres plus loin puis rentre dans la culture et disparaît.
J'avance doucement en surveillant le tournesol et rejoins la haie que je passe pour suivre la parcelle suivante. De plus en plus de tournesol sont broutés ou frottés et j'espère bien voir le ou les responsables. J'arrive ensuite au bord d'un grand fossé qui rejoint l'Osse et borde un bosquet parcouru de très nombreuses coulées. Je passe doucement le fossé et me poste au bord de la rivière pour appeler à l'appeau un moment. Rien ne venant, je traverse doucement le bosquet et passe le fossé qui borde l'autre côté du massif pour rejoindre une bande de peupliers d'environ 30 mètres de large qui longe la rivière. La bande entre les arbres et la rivière a été retournée mécaniquement et je progresse sur des mottes de terre friables, le vent face à moi est soutenu. J'ai fait à peine 40 mètres en surveillant les alentours quand mes yeux se posent sur un brocard à moins de 15 mètres dans les peupliers. Je me fige derrière quelques repousses de colza asséchées qui ne doivent pas me masquer beaucoup. Le brocard regarde vers moi et je pense qu'il m'a vu mais, au bout d'un moment, il s'avance et biaise vers moi. Je profite d'un peuplier qui masque son regard alors qu'il passe derrière pour armer mon arc. Il s'arrête un moment à couvert de cet arbre de 3/4 face à 10 mètres environ puis repars et s'avance à pas lent, plein travers à environ 8 mètres de moi. Mon viseur se cale, je décoche. Touché trop en arrière, il démarre en trombe et fonce sur environ 30 mètres, s'arrête derrière un peuplier puis commence à partir en marche arrière sur quelques mètres et tombe.
Je l'ai perdu de vue.
Le pensant mort, je pars chercher ma flèche sans prêter attention au brocard et trouve une tache de sang à l'endroit du tir.
Cette tache m'oriente et je trouve rapidement ma flèche couverte de sang et fichée au sol sous la végétation.
La piste de sang semble faible et ne trouvant que peu d'indices, je décide de partir droit vers l'endroit où je pense trouver mon brocard mais impossible de le trouver. Je passe donc les lignes de peupliers une à une alors que l'orage menace, le tonnerre gronde au loin. J'espère qu'il ne va pas se mettre à pleuvoir avant que je ne le retrouve, je tourne et retourne sans succès et retourne plusieurs fois à l'endroit du tir pour me remémorer la fuite mais impossible de trouver le chevreuil. Je reprends donc au début de la piste et la suis tout doucement, la perdant souvent à cause des maigres indices mais, petit à petit, je progresse quand j'aperçois, 10 mètres après les derniers peupliers, une touffe de végétation qui s'agite et part droit vers cet endroit où je retrouve mon brocard mort, il venait de donner ses derniers coups de patte. Ma flèche est très en arrière et traverse le foie.
En me retournant, je m'aperçois que la piste de sang est un peu plus marquée juste avant mon brocard.
Je ne comprends pas trop ce qui s'est passé, soit il s'est relevé pour mourir juste quelques mètres plus loin soit j'ai mal vu l'endroit de sa chute. J'appose mon bracelet et fais quelques photos avant de le charger sur mon épaule pour revenir à ma voiture avant que l'orage ne s'abatte sur moi.
Alex