Après quelques heures de sommeil, une vive douleur envahit mes bras pendant un moment, une sensation très bizarre comme si un liquide avait du mal à couler dans mes veines. Cette douleur va durer un long moment puis s'estomper comme elle était venue. Xavier se réveille doucement, nous ressortons de nos hamacs alors que Lauro revient bredouille de sa chasse. Nous rangeons nos affaires et plions le camp avant de charger la barque. Nous ramassons nos déchets et ceux des autres puis embarquons. Le canoë est attaché derrière la barque, nous partons avec la marée descendante car Xavier veut essayer de récupérer son fusil et son sabre là où nous avons chaviré cette nuit. La barque file sur l'eau, Lauro à l'avant nous dirige, je suis au milieu et Xavier à la manœuvre, je m'aperçois alors que j'ai oublié de prendre mon appareil photo que j'ai rangé dans une des touques. N'ayant rien d'autre à faire qu'admirer le paysage, j'observe les berges et les arbres à l'affût des animaux. J'aperçois ainsi un anhinga qui s'envole à notre arrivée.
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L'ANHINGA D'AMERIQUE (Anhinga anhinga) - Le blog de Alex.bowhunter
Systématique : Ordre : Suliformes Famille : Anhingidés Genre : Anhinga Espèce : anhinga Biométrie : Taille : 91 cm Envergure : 109 cm. Poids : Longévité : 12 ans Répartition : Description : ...
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cet oiseau ressemble un peu à un cormoran mais son bec est plus long et pointu et son cou très long. Il se nourrit de poissons et sur l'eau, seul son cou dépasse généralement de la surface. Nous croisons quelques gros martins-pêcheurs qui volent devant nous, se posent en nous attendant puis repartent. Le trajet jusqu'à la zone de l'accident me semble durer une éternité alors que nous avançons vite poussés par le moteur de la barque. En tournant la tête à gauche, il me semble apercevoir un anaconda posé sur la berge dans les moucoumoucous à environ 15 ou 20 mètres. J'en averti Xavier qui stoppe et fait demi-tour pour aller le voir. Il se cale sur le ban de vase à quelques mètres du grand serpent. J'ai eu beaucoup de chance de le voir à cette distance et à la vitesse où nous allions, ce sont ses taches vertes foncées qui lui servent généralement de camouflage qui l'ont trahi.
Nous ne voyons que son corps, la tête est cachée derrière les moucoumoucous et je tente de l'apercevoir sans succès.
Au bout d'un moment, je finis par la voir alors qu'il bouge un peu. Sa tête est derrière des moucoumoucous dans un filet de boue et d'eau qui descend du ban de vase vers le fleuve. Petit à petit, le serpent sort de sa torpeur et commence à bouger vraiment, tournant sa tête couverte de boue vers nous comme pour nous observer. Lauro ne semble pas rassuré et agite la pagaie et lui jette un peu de boue pour le dissuader de venir vers nous à chaque fois qu'il semble se diriger vers la barque.
Après quelques hésitations, l'anaconda se décide et commence à s'avancer à découvert sur la vase en direction du fleuve.
Il se déplie alors totalement et rampe vers l'eau. Il est immense et doit bien faire 5 mètres de long. Je suis aux anges. Ce séjour en forêt, même s'il n'a pas été riche en prélèvements aura été mon meilleur séjour de tous ce que j'ai pu faire en Guyane car il m'a permis de voir nombre d'animaux que je n'avais pas encore pu voir et que je rêvais d'apercevoir. Xavier filme le grand serpent qui s'avance tranquillement vers notre canoë en plaisantant car nous avons chaviré très près de cet endroit cette nuit et nous sommes tous les 2 contents de ne pas avoir eu affaire à lui. Alors qu'il arrive près de l'eau, je me réveille de mon rêve et demande à Xavier s'il n'est pas possible de l'attraper. J'adore les serpents et ce serait plus qu'un rêve pour moi de pouvoir manipuler une telle bête avant de la relâcher mais Xavier, fatigué par notre périple d'hier m'en dissuade et nous le regardons s'enfoncer dans l'eau avant qu'il ne disparaisse. Cette image est vraiment impressionnante, il plonge et malgré sa taille disparaît totalement dans l'eau vaseuse.
Nous repartons et arrivons assez vite à l'endroit de l'accident. La marée plus basse qu'hier a dégagée 30 cm du tronc que nous avons percuté et l'impact plus clair est bien visible dans le bois noir. Xavier se met à l'eau pour sonder le fond avec ses pieds mais l'eau est encore trop haute et, après quelques tentatives, il renonce et remonte sur la barque. Lauro se propose de revenir chercher le fusil dès qu'il reviendra dans le secteur. Nous reprenons notre route vers Régina, les berges découvertes par la marée portent les traces des habitants du secteur qui sont remontés en forêt ou descendus dans l'eau. Des ruisselets dessinés par les arrivés d'eau de la forêt creusent également la vase. Un peu plus loin, un clapotis anormal attire mon regard sur la gauche contre la berge du fleuve, quelque chose s'agite au bord de l'eau. Xavier qui m'a vu regarder me dit qu'il s'agit d'une raie, ces poissons plats sont munis d'un ou 2 dards au niveau de la queue et leur piqûre peut être très dangereuse voire mortelle et nous nous sommes baignés avec elles hier soir.
Nous commençons ensuite à voir des ibis rouges sur les berges mais ce sont des jeunes qui n'ont pas encore leur plumage rouge vif mais plutôt marron avec quelques pointes de rouge. Ils fouillent la vase à la recherche d'invertébrés qui constituent leur alimentation. Certains volent au-dessus de nous et semble nous accompagner.
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L'IBIS ROUGE (Eudocimus ruber) - Le blog de Alex.bowhunter
Systématique : Ordre : Pélécaniformes Famille : Threskiornithidés Genre : Eudocimus Espèce : ruber Biométrie : Taille : 61 cm Envergure : 101 cm. Poids : 772 à 935 g Longévité : 16 ans Ré...
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En continuant, nous commençons à apercevoir des vidons blancs qui font du surplace en bordure du fleuve, Xavier m'explique que ce sont des flotteurs pour des lignes de pêche. Les pêcheurs du coin attache un ligne solide avec un très gros hameçon appâté avec un bout de poisson pour attraper un poisson localement appelé "torche", c'est un gros poisson chat (Brachyplatystoma filamentosum) du nom de bagre laulao, il peut atteindre une taille impressionnante et a fait l'objet de plusieurs reportages dans "River Monsters"
Un des bidons semble s'agiter et faire des mouvements verticaux. Lauro me fait signe que quelque chose tire sur la ligne en me faisant comprendre qu'un poisson a mordu. Plus loin nous croisons les pêcheurs qui viennent relever leurs lignes et nous les saluons alors que Lauro leur fait signe qu'un poisson est pris. Ils nous saluent également. Nous débouchons ensuite sur le fleuve principal, le mythique Approuague et je n'en crois pas mes yeux, la largeur de ce fleuve est incroyable, on a du mal à voir la berge opposée. Je n'avais pas vu ça à l'aller car nous avons navigué de nuit.
L'eau est plus agitée et Lauro devient alors nos yeux car sous la surface de l'eau se cachent de nombreux pièges. Les courants et certains rochers presque affleurant pourraient nous faire chavirer. Il nous guide donc de signes de la main pour nous faire éviter ses obstacles invisibles juste trahis par un remous en surface du fleuve.
Xavier comme à son habitude plaisante à l'arrière malgré la fatigue.
Le paysage défile pendant plusieurs heures. Nous croisons des îlots densément boisés plus ou moins grands disposés au milieu du fleuve.
Les berges sont couvertes d'un épais ban de moucoumoucous ou de végétation épaisse et impénétrable ou de long bans de mangrove dont les racines entremêlées des palétuviers (arbres supportant l'eau salée) rendent souvent difficile l'accès à la forêt plus en arrière.
Nous coupons ensuite un virage du fleuve par un chenal sur la droite.
L'ampleur des marées est bien visible sur les feuillages au bord du fleuve.
En ressortant du raccourci, nous apercevons un énorme rocher qui refait surface au milieu du fleuve. C'est ce type d'obstacle qui une fois recouvert par la marée ou une crue du fleuve peut devenir un piège pour les embarcations.
Après plusieurs heures de navigation, mes fesses meurtries par la position assise, nous arrivons enfin à Régina dont quelques maisons et la grande antenne se dessinent au loin.
Arrivés au débarcadère, nous déchargeons nos affaires et Xavier part chercher le pick-up que nous chargeons avant de partir manger un bout chez Lauro. Arès cette collation nous prenons la route pour revenir sur Kourou. En route nous discutons avec Xavier quand il freine et me dit regarde les coatis. Je tourne la tête et aperçois un coati brun adulte entrain de traverser. Xavier s'est arrêté pour ne pas l'écraser quand 4 petits coatis surgissent de la végétation du talus au bord de la gauche de la route. Ils nous regardent un instant puis commence à remonter dans la végétation. Je me précipite vers eux pour essayer de les voir de plus près mais ils ont disparu et leur mère s'est déjà avancée dans la jungle en contrebas de la route à droite de la voiture. Je retourne à la voiture et nous repartons.
L'après-midi sera consacrée à la logistique et au repos, il nous faut amener le moteur du canoé qui a pris l'eau à la révision, faire un machine pour laver nos affaires de chasse et faire le point sur le matériel et ranger un peu. J'en profite pour cibler mon arc sur les cibles de pécari en mousse dans le terrain de Xavier. Mon arc ne semble pas avoir souffert ne notre mésaventure, mes flèches volent toujours aussi bien.
Après le repas du soir, je descends vers la terrasse couverte de Xavier pour tenter d'apercevoir un matoutou (mygale arboricole) dont plusieurs spécimens vivent chez Xavier. J'en aperçois justement une sur la rambarde de la terrasse et m'approche pour l'observer. L'amie de Xavier qui est descendue pour voir si j'avais réussi à en trouver une me propose de me prendre en photo avec la mygale sur mon bras en m'affirmant que cette espèce et pacifique et inoffensive. Je prends mon courage à deux mains et attrape l'arachnide pour la poser sur mon bras pour une petite séance photo. Elle avance doucement sur moi sans faire attention à moi.
Je la fais ainsi passer d'un bras à l'autre pendant un petit moment avant qu'elle en ait assez et saute pour rejoindre le sol où je la laisse reprendre ses activités nocturnes.
Cette nuit, une fusée doit être lancée de la base spatiale de Kourou vers 2 heures, je n'ai jamais pu assister à cet événement en 3 ans, je programme donc mon réveil et pars me coucher. Vers 2 heures, je me lève donc pour me poster sur la terrasse de Xavier en fixant l'horizon. Xavier m'avait expliqué où regarder mais le temps passe et rien ne vient. Je somnole un peu sur ma chaise quand un grand éclair de lumière surgit plus à gauche que ce que je l'attendais, j'ai mal compris les explications de mon hôte. La boule de feu s'élève dans le ciel et un terrible vrombissement emplit l'air. La maison de Xavier se met alors à trembler de partout puis la forme de la fusée se dessine derrière les nuages et je finis par la perdre de vue au-dessus de la toiture de la terrasse. C'est un spectacle vraiment impressionnant malgré la grande distance.
Alex